Certes, le simple fait de s’interroger sur la santé du diesel laisse penser que cette technologie autrefois triomphante est entrée dans la phase des soins palliatifs. Et s’il est vrai qu’on n’en est pas très loin, les constructeurs continuent d’en vendre, alors que le diesel représente encore plus de 70 % du carburant distribué à la pompe en France.
C’est donc l’occasion de faire un petit bilan de santé, à l’heure où de nombreux automobilistes qui apprécient leur plaisir de conduite et leur appétit modéré s’interrogent encore sur le réel intérêt qu’il y aurait à passer aux moteurs électrifiés.
Le diesel est-il cuit ? Aussi abrupte qu’elle puisse paraître, cette question permet de mettre les choses au clair. Alors que le diesel a longtemps dominé de manière inattendue les ventes de voitures neuves, tant en France qu’en Europe, sa baisse est spectaculaire depuis l’éclatement du tristement célèbre Dieselgate en septembre 2015.
Nous sommes passés de 55% des ventes de voitures neuves en Europe en 2012 à 45% en 2017, puis à… 17% sur les trois premiers trimestres 2022 ! En France, pays qui a longtemps privilégié cette technologie, les immatriculations de voitures diesel neuves sont tombées à 199 000 unités de janvier à octobre, contre 299 000 un an plus tôt ! 100 000 voitures de moins !
57% des voitures diesel circulent en France
En d’autres termes, le parc s’éteindra de lui-même d’ici quelques années, et peut-être plus rapidement qu’on ne le pensait auparavant, mais il est toujours important.
De plus, aujourd’hui près de 22 millions de voitures diesel circulent en France sur un total de 38 millions – soit 57% – et cela explique que le diesel reste de loin le carburant à la pompe le plus répandu.
En septembre, la part de gazole utilisée dans les carburants routiers était encore de 73,2 %. On ne connaît pas la part des poids lourds dans ce chiffre, mais le fait est que le carburant domine toujours le pays.
Et il a du mérite pour cela, car les obstacles qui se dressent sur son chemin sont nombreux. Entre la flambée des prix à la pompe (+27,2 centimes sur un an, selon le site carbu.com, contre +4,3 centimes pour le SP95-E10), l’interdiction d’accès aux futures zones à faibles émissions de mobilité (ZFE-m) et l’opinion dominante qui tient maintenant à faire honte à ce qu’elle adorait hier, les temps sont durs !
Et ce, quelles que soient les qualités d’une technologie qui n’a jamais été aussi pointue. Les diesels d’aujourd’hui se présentent comme des « monstres » de confort et d’économie de carburant, vous pouvez donc traverser le pays tranquillement et à bonne vitesse sans même vider tout le réservoir.
Pour vous en convaincre, nous vous renvoyons par exemple à notre récent essai de la BMW Série 4 Grand Coupé 30d. Au programme, 6 cylindres qui délivrent environ 286 ch, 5,3 secondes de 0 à 100 km/h, tout cela pour seulement 145 g CO2/km. Une petite merveille !
Les automobilistes avertis ne conduisent pas au-delà. BMW, interrogé par Caradisiac, indique que le diesel représente encore 38% de ses ventes totales en France depuis le début de l’année. Ce chiffre monte même à 54 % des ventes sur la Série 3, et 55 % sur la Série 5.
Dans l’interview qu’il a accordée à Caradisiac au salon de l’auto de Paris, Xavier Chardon, patron du groupe Volkswagen France, expliquait que le diesel intéresse toujours une (petite) clientèle d’automobilistes qui parcourent 30 à 40 000 km par an et pas convaincue que l’électrique ou l’hybride sont les mieux adaptés.
Bref, quand l’électrique et l’essence poussent leurs fermiers, le diesel fait (un peu) de la résistance… sans trop d’illusions malgré tout. « Quoi qu’on fasse au thermique, on ne descendra pas en dessous de 80g CO2/km. L’électrification est la seule solution si on veut « zéro carbone », a déclaré Michel Forissier, responsable de l’ingénierie du groupe Valeo, dans un entretien à Caradisiac le dernier le printemps.
Les constructeurs cessent d’investir
Plusieurs constructeurs, dont Stellantis, ont déjà annoncé qu’ils cesseraient d’investir dans des moteurs thermiques répondant à la nouvelle norme Euro 7, en raison des coûts de développement et de fabrication que cela implique, de l’ordre de 3 à 5 000 €. Elle doit réduire les émissions de NOx de 25 % à 60 milligrammes par km, contre 80, qui sont actuellement sous Euro 6, et cela implique des investissements qui ne seront probablement jamais rentables pour les marques.
Il est donc inutile d’espérer un retour brutal au diesel, même si Thierry Breton a récemment tenté de retarder le calendrier de la fin prévue du thermique en Europe, en 2035.
Dans un entretien aux Echos début novembre, le commissaire européen au Marché intérieur a précisé les choses ainsi : « J’annonce la création d’un groupe de travail pour préparer l’échéance 2026. Les grands constructeurs automobiles, équipementiers, syndicats, utilisateurs associations, villes, opérateurs électriques… Son objectif sera d’identifier et de répondre aux difficultés de mise en œuvre de cette méga transformation.Les questions sont très nombreuses et il faudra peut-être adapter les mesures que la trajectoire vers 2035 supporte.
On ne se fera cependant pas trop d’illusions sur la « Revoyure » de 2026, qui semble avant tout motivée par la nécessité d’apaiser les industriels ébranlés ces dernières années.
Libre à vous d’acheter un diesel neuf, donc, mais veillez à le faire délibérément, avec la perspective d’une revente bien moins facile que par le passé.
Dans ces conditions, on peut aussi se demander s’il est toujours judicieux d’acheter un diesel d’occasion. Dans une longue enquête qu’il a consacrée au sujet de Caradisiac, Manuel Cailliot résumait les choses en ces termes : « avec son image de marque en berne, le diesel, semble-t-il, devient une occasion bien plus abordable qui se maintient depuis des décennies. Des notes plus élevées que les modèles à essence. Donc, de bonnes affaires à faire. «
Bonne affaire certes, mais sachant, comme décrit dans l’article, que le diesel reste cher en termes d’entretien, principalement en raison du prix élevé de certaines pièces détachées, que sa revente sera plus difficile (surtout pour les modèles) au fil des années. vignette Crit’Air 2), et que la législation anti-pollution interdit l’accès à un nombre croissant d’agglomérations.
Pour toutes ces raisons, nous sommes bien les lents aperçus d’une technologie qui, paradoxalement, n’a jamais été aussi agréable et efficace qu’aujourd’hui.