Publié
le 10/06/2022 à 10:00, Mis à jour le 13/06/2022 à 11:50
Polar Mission, la nouvelle exposition événement, interroge sans équivoque l’avenir de ces territoires de glace menacés par le réchauffement climatique. Paradoxal au royaume du bling-bling ? Pas nécessairement.
Une exposition sur les pôles à Monaco : certains y verront un paradoxe. Alerte au changement climatique du haut de ce Rocher symbole de la démesure, bercé par le bruit des hélicoptères, marqué par un nombre d’oeuvres au kilomètre carré à faire pâlir Anne Hidalgo : une blague ! N’allez pas trop vite. On oublierait que la principauté comptait en son sein l’un des premiers explorateurs polaires : le souverain Albert Ier – fils de Charles III, créateur de la Société des Bains de Mer et à l’origine du coup de génie qui transforma Monaco en capitale. de jeux… Pareil, l’ambivalence monégasque n’est pas nouvelle !
Entre 1889 et 1907, le « prince érudit » a mené quatre campagnes d’expédition à Svalbard, dans le nord de la Norvège, sur son navire-laboratoire, le Princess Alice II. De retour sur la terre ferme, il fonde en 1910 le Musée océanographique de Monaco, somptueux palais néo-baroque suspendu à la falaise. A l’occasion du centenaire de la mort de ce pionnier, le musée consacre une exposition de deux ans aux terres polaires, gardiennes glaciales de la bonne marche de la planète.
Longtemps protégés des désirs humains par son éloignement et la rudesse de son climat, les pôles ne sont plus les sanctuaires qu’ils étaient autrefois. La marraine de l’événement, Mélanie Laurent, l’a bien résumé lors de l’inauguration le jeudi 2 juin : « La bioacoustique Michel André a placé des micros dans les endroits les plus reculés de la planète pour répondre à cette question : il y a encore une place » sur terre sans humain son? La réponse est non. Alors écoutons nos pouls.
Des chiffres qui font froid dans le dos

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Ecouter les pôles pour les protéger, c’est ce qui nous invite à faire Mission Polaire, en commençant par apprendre au visiteur à distinguer le nord du sud. Saviez-vous que l’ours polaire était l’apanage de l’Arctique, le pingouin de l’Antarctique ? Que l’Arctique était habité, pas l’Antarctique ? Outre un tour d’horizon des espèces et des liens qui les unissent – le krill microscopique est indispensable à la colossale baleine à bosse – l’exposition présente les grandes figures de l’expédition polaire, de Jean-Baptiste Charcot à Jean-Louis Étienne. Certains chiffres, recueillis en cours de route, sont effrayants. En Antarctique, la température est passée de 3 à 4 degrés en cinquante ans, contre 1 à 2 dans le reste du monde. Quant aux ours polaires, il n’en reste que 25 000.
Saviez-vous que l’ours polaire était l’apanage de l’Arctique, le pingouin de l’Antarctique ?
Une approche ludique et un certain sens du spectacle permettent d’échapper au ton moralisateur qui pèse parfois sur le discours environnemental. A l’entrée, le visiteur, promu « reporter aux pôles », se voit remettre une carte de presse, sésame pour accéder au contenu multimédia. Quelques salles plus loin, un cube de 650 m tapissé d’écrans propose une rencontre immersive avec ours, baleines et autres manchots. Grâce à l’image de synthèse en temps réel, des phoques, plus vrais que nature, semblent réagir à nos caresses. Soudain, sous nos pieds, la calotte glaciaire se fissure. Piégé dans un glacier devenu glaçon, l’ours polaire se consume sous nos yeux.
C’est fini, l’homme a tué l’ours polaire, continuez, il n’y a rien à voir ? Loin de là! L’autre piège que l’exposition monégasque évite soigneusement est le manichéisme. « Nous ne voulons pas défendre l’environnement contre l’homme. En plus de ses menaces, le changement climatique a des conséquences positives sur le développement de l’économie inuit », a déclaré le directeur du musée, Robert Calcagno, qui prône une « économie bleue raisonnable ». La collection de Jean Malaurie – cette année marque aussi les 100 ans – révélant les habitudes et coutumes de ces gens du Nord – qu’il ne faut plus appeler « Esquimaux », surnom péjoratif signifiant « mangeur de viande crue ».
Que faire ?
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Une fois que vous avez changé la couche de glace pour du bitume surchauffé, dans l’environnement à 25 ° C de l’été monégasque, une question demeure. Que faire ? « Personne ne peut tout faire, mais tout le monde peut faire quelque chose », philosophe Robert Calcagno. Avant d’évoquer la mémoire de son prédécesseur, le commandant Cousteau, à la tête du musée pendant plus de trente ans. En 1990, pour contrer les projets miniers en Antarctique, elle lance une pétition qui recueille plus d’un million de signatures. Un an plus tard, il suivra le protocole de Madrid, qui définit le pôle Sud comme une zone de paix et interdit l’exploitation de ses ressources.
Parmi les petits gestes qui font du bien, le plus agréable reste peut-être… d’aller au musée ! Chaque candidature « Polar Mission » contribue aux fondations Albert-I et Prince-Albert-II, qui financent des projets de recherche tels que « Tara Arctic » (2013) ou « Ice Memory » (2025). Cinq centimes sont aussi alloués au fond des aires marines protégées, dont la plus grande, en mer de Ross, a été lancée par un prince… Un certain Albert II.