Le 26 septembre, le Comité européen des droits sociaux a condamné le fameux « barème Macron », adopté par décret en 2017, qui limite l’indemnisation en cas de licenciement abusif. Cette instance du Conseil de l’Europe a estimé que les plafonds envisagés « ne sont pas suffisamment élevés pour réparer le préjudice subi par la victime et avoir un effet dissuasif sur l’employeur ».
C’est un mépris pour le Président de la République. Il est temps de revenir sur cette réforme qui oblige le juge à abandonner les principes de responsabilité civile du droit commun, à savoir l’évaluation du préjudice réel subi par la partie lésée et la détermination du montant de son indemnisation.
Incitation à licencier abusivement
Il est tout à fait injuste qu’un travailleur de 55 ans licencié pour faute après un an de contrat de travail ne puisse bénéficier que d’une indemnité inférieure à deux mois de salaire. Ceci pourrez vous intéresser : Pascal Coyo : « Transitions Pro IDF permet à tous les salariés de suivre une reconversion professionnelle ». Cette échelle est une incitation à l’abus des employés. C’est inacceptable!
Mais cette décision du Conseil de l’Europe n’est pas la seule pierre dans le jardin du président de la République sur la question du travail. Les évaluations des décrets de 2017 concordent et pointent du doigt les dégâts causés dans les entreprises par la création d’un organe unique de représentation du personnel, le Comité économique et social (CSE).
A l’heure où les risques psychosociaux (RPS) et les troubles musculo-squelettiques (TMS) gangrènent les secteurs privé et public, la disparition du Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT) affecte gravement la capacité des représentants du personnel à jouer un rôle en matière de risques professionnels prévention, au plus près de la réalité du terrain. Le CSE peine à aborder tous les sujets et les élus sont débordés comme en témoignent les différentes révisions d’ordonnances.
Une situation scandaleuse
Nous appelons donc le gouvernement à mettre en place une autorité de santé au travail qui disposera d’une réelle expertise sur les projets de réorganisation du travail et d’un droit de veto en cas de risque grave. Lire aussi : Lituanie : Santé et pharmacie.
Enfin, les offres d’emploi de 2017 ont également enterré une grande partie de l’appareil comptable de pénibilité créé en 2015 en supprimant quatre facteurs de risque, et non des moindres, qui permettaient aux employés exposés de prendre une retraite anticipée, de travailler à temps partiel en fin de carrière ou de se recycler .
Cette situation est d’autant plus scandaleuse que le président du pays tente d’introduire un nouveau report de l’âge de la retraite. Bien que des mesures très strictes aient déjà été prises au cours des dernières décennies, nous rejetons tout retour en arrière sous quelque forme que ce soit. En revanche, nous exigeons du gouvernement qu’il améliore immédiatement la prise en compte des pénibilités.
La réforme injuste de l’assurance chômage
Comme nombre de ses voisins le font déjà, la France doit enfin mettre en place des politiques permettant un travail durable tout au long d’une carrière. C’est un enjeu clé de justice sociale, car les écarts d’espérance de vie entre les plus favorisés et les plus précaires sont encore très importants. Voir l’article : Trottinettes électriques : tout ce qu’il faut savoir sur la réglementation en vigueur. C’est aussi une question d’efficacité économique, puisqu’aujourd’hui un salarié sur deux qui met fin à ses droits à la retraite n’est plus en emploi.
Enfin, la réforme injuste de l’assurance-chômage, encore une fois mise en œuvre autoritairement au cours du dernier quinquennat, a déjà privé des dizaines de milliers de chômeurs de toute indemnisation et en a appauvri bien d’autres. Alors que des temps difficiles se profilent à nouveau dans le domaine économique, le gouvernement veut aller encore plus loin dans cette direction. C’est clairement inacceptable.
Loin de réhabiliter la « valeur du travail », comme il le prétend, l’action d’Emmanuel Macron depuis 2017 a en fait eu tendance à baisser régulièrement sa qualité et sa rémunération. Cette politique est non seulement socialement injuste, mais aussi économiquement contre-productive : notre pays et ses entreprises ont besoin de travailleurs bien formés, en bonne santé, motivés parce qu’ils sont en sécurité dans leur emploi, correctement payés et impliqués dans les décisions qui sont prises dans l’entreprise. Bref, tout le contraire de la politique menée aujourd’hui.
François Desriaux, spécialiste en médecine du travail, ancien candidat EELV aux élections européennes,
Guillaume Duval, ancien rédacteur en chef d’Alternatives économiques,
Eric Ferrères, expert en relations sociales,
Yannick Jadot, député EELV,
Eva Sas, Adjointe EELV pour Paris
Sophie Bussière, conseillère fédérale EELV
Régis Godec, conseiller fédéral EELV
Barbara Romagnan, auteur du rapport parlementaire sur 35 heures