Un peu comme si le bassin s’était transformé, malgré lui, en un immense bassin ou aquarium mais sans aucune vie sous sa surface… Introduit à la fin du 18ème siècle, d’Amérique du Sud, comme bassin de décoration aquatique, la laitue d’eau a peu à peu colonisé les plans d’eau réunionnais. Il est décrit comme « très abondant » dans tous les plans d’eau douce côtiers par le Invasive Species Group. L’augmentation de la chaleur et de la pollution des rivières a probablement aidé, et augmente. Il a atterri, d’une manière encore inconnue, dans la mare aux oiseaux aquatiques il y a environ deux ans. Il l’a ensuite colonisé en un temps record jusqu’à le recouvrir entièrement d’un rideau vert très compact. A tel point qu’un chat s’en est servi hier comme tapis pour traverser le plan d’eau ! Nouvel ennemi aquatique, la laitue d’eau peut doubler de superficie tous les 10 à 15 jours. Rejet de l’aquarium ou présentation naturelle ? Si nous l’ignorons maintenant, les conséquences sont déjà visibles. Tueur silencieux, la laitue étouffe la faune et la flore en bloquant la lumière, ce qui stoppe la photosynthèse.
« C’est certain qu’il n’y a plus de poissons en dessous », assure Jean-Patrice Atchama, patron de la société NPL, spécialisée dans l’assainissement des plans d’eau. Il confirme l’envahissement général de l’île : « Ils sont partout, j’interviens aussi dans le Bocage de Sainte-Suzanne, dans la petite mare du Colosse avec l’AAPMA, dans les gorges de Maniron à Saint-Louis et dans la mare du Gol avec ‘r Quand c’est là, il n’y a plus rien d’autre, pour moi c’est quelqu’un qui doit le jeter là, ça se développe trop vite dans les mares et les gens s’en débarrassent », estime-t-il. Après de longs mois de tractations entre la mairie, l’Etat et la Cirest, pour savoir qui devait s’occuper du nettoyage, c’est lui, au volant de sa bêche amphibie, qui a la lourde tâche de déchirer sa piscine d’envahisseur. Pas facile : on estime qu’au moins 300 tonnes de la masse doivent être déblayées ! La construction doit durer au moins 6 semaines. La laitue est poussée à terre et enlevée avec une bêche. Ils sont ensuite laissés à sécher et donnés aux agriculteurs pour les utiliser comme engrais. Pas une fin en soi. A peine enlevée, la laitue recommencera à coloniser le milieu. Le nettoyage devra être permanent, en attendant une solution pour l’éliminer (lutte biologique) et comprendre comment il en est arrivé là. L’objet d’une étude qui sera financée par le Cirest, aux commandes du nettoyage avec le soutien financier de l’Etat (un total de 60 000 euros). Présent hier, Stéphane Fouassin annonce qu’une association va être créée pour entretenir et nettoyer la piscine précisément dans le temps. Une lutte acharnée dont la fin s’annonce lointaine… Une surveillance écologique sera également menée pour surveiller le retour de la vie dans l’étang.