Des panneaux solaires attendent d’être recyclés à l’usine aquitaine d’Envie2E / Image : RE-HL.
Que deviennent les panneaux photovoltaïques en fin de vie ? Ils ne sont pas jetés à la décharge ni jetés aux ordures ménagères, mais sont recyclés dans des usines spécialisées. Nous avons visité un site de recyclage en France qui utilise une technologie unique au monde pour recycler au mieux les matériaux contenus dans les panneaux.
Si un panneau photovoltaïque est endommagé, complètement détruit ou tout simplement considéré comme trop ancien, il est systématiquement pris en charge dans une filière de traitement spécialisée. Hormis un acte malveillant, il n’y a aucune raison de les retrouver jetés en pleine nature.
La livraison à domicile de panneaux photovoltaïques usagés est en effet gratuite à partir de 40 unités, que vous soyez particulier ou professionnel. Ci-dessous, il est obligatoire de les déposer dans l’un des 230 points de dépôt volontaire en France. La démarche est simple, il suffit de contacter Soren, seul organisme chargé de coordonner, d’organiser et de financer la transformation des panneaux solaires en France.
Sommaire
Le délaminage en alternative au broyage
Mais une fois démontés, que deviennent-ils ? Les modules sont envoyés à l’un des cinq lieux de traitement sur le territoire du pays. Parmi elles, l’usine Envie2E Aquitaine, qui a démarré ses activités très récemment, en septembre 2022. Ceci pourrez vous intéresser : LES POMPIERS13 HOMMAGE À OLIVIER DAMON. Cet endroit est le seul au monde où les panneaux sont démontés selon la méthode de « délaminage », qui permet de séparer les composants plus proprement que le meulage traditionnel.
Nous avons visité l’usine de Saint-Loubès (Gironde), une banlieue nord de Bordeaux. Emplacement idéal, le domaine est le mieux équipé en matériel photovoltaïque. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le site ne recèle pas que des panneaux solaires vraiment usagés.
Lire aussi
Des panneaux en parfait état mis au rebut
La France a recyclé 3 700 tonnes de panneaux photovoltaïques en 2021 Sur le même sujet : Daimler Truck présente son premier camion électrique d’une capacité….
A l’accueil, les modèles très anciens âgés de 20-30 ans sont rares. La plupart des panneaux mis au rebut semblent assez neufs mais ont clairement subi un désastre. Pour des raisons pas toujours très claires, il arrive aussi que des panneaux entièrement fonctionnels se retrouvent dans des filières en fin de vie. Ainsi, l’usine Envie2E Aquitaine a développé une filière « seconde vie » en parallèle du démantèlement.
Frustré à l’idée de démonter des panneaux de travail, Frédéric Seguin, le chef de chantier et accompagnateur de notre visite, préfère les recycler après plusieurs tentatives. Mais comment orienter chaque panel vers le traitement le plus abordable et le mieux adapté à cette condition ?
Le traitement des panneaux cassés
Processus de recyclage des panneaux solaires à Envie2E Aquitaine / Infographie : RE. Voir l’article : Teloche La construction du centre de santé a commencé.
Tout d’abord, le panneau est inspecté visuellement. Une fois qu’il est complètement cassé, il est envoyé à un « décadreur », une machine qui décolle simplement le cadre en aluminium des panneaux. Envie2E revend l’aluminium aux recycleurs à un prix variable selon la disponibilité ou non d’autres matériaux. Une vis en acier ou un bout de silicone suffisent à dévaloriser beaucoup, explique Frédéric Seguin, qui doit parfois déléguer un employé pour retirer manuellement ces intrus.
Le reste est livré comme dans les autres usines où il est broyé. Les matériaux contenus dans la poudre (verre, silicium, métaux, plastiques) sont ensuite séparés pour être recyclés, mais avec des pertes plus importantes qu’avec la technique de délaminage propre à la maison.
Le traitement par délaminage
Collecte des panneaux solaires en fin de vie. Un conteneur à déchets contenant les cadres en aluminium des panneaux avant de les envoyer à un recycleur spécialisé. / Photos : RE-HL.
L’usine Envie2E est équipée d’une machine unique au monde, un prototype de « délamineur » spécialement conçu pour le traitement des panneaux photovoltaïques. La machine, conçue et fabriquée au Japon et achetée 2 M€, a été mise en service à Saint-Loubès en raison du volume de panneaux traités. Au Japon, il n’y aurait pas assez de modules utilisés pour compléter les réglages de la machine, confirme Frédéric Seguin.
Son usine doit donc parfois balayer le plâtre. Il faut dire que le délamineur travaille avec une précision au dixième de millimètre. Il accomplit une tâche particulièrement délicate : scalper les panneaux pour séparer le verre (70 % du poids du panneau) de la couche de polymère contenant les cellules d’argent et de silicium.
Lire aussi
Des chercheurs allemands ont mis au point un procédé pour recycler le silicium des modules solaires usagés
Pour ce faire, le délamineur presse les panneaux contre une lame de rasoir géante, qui est chauffée à une température de 300°C grâce à une résistance électrique. Un rouleau complètement flexible de polymères et de cellules sort d’une part, et une plaque de verre complètement propre d’autre part.
Le verre est envoyé chez un verrier, aujourd’hui Saint-Gobain, pour produire du « verre plat ». Il ne peut pas être réutilisé pour fabriquer du verre de qualité alimentaire car il contient de l’antimoine, un minéral toxique utilisé pour contrôler l’opacité du panneau.
La revente de panneaux de « seconde vie »
Le rouleau de polymères est envoyé à un recycleur spécialisé : RoSi Solar (Silicon Return). L’entreprise grenobloise récupère ensuite les éléments contenus dans le mille-feuille, comme le silicium, l’argent et le cuivre. Enfin, la boîte de jonction précédemment retirée est prise en charge par d’autres recycleurs de métaux.
A gauche : un rouleau de polymères contenant des cellules. A droite : détail de la cellule. En bas : panneau à demi-échelle. / Photos : RE-HL.
2 à 3 fois moins cher que le neuf
Si le panneau semble sain, il est testé pour déterminer ses performances résiduelles. Car même un module photovoltaïque usé peut parfois continuer à produire de l’électricité. Envie2E effectue donc une inspection thermographique puis électroluminescente du panneau pour détecter des fissures ou des défauts d’isolation invisibles à l’œil nu.
Un flash simulant le soleil est alors utilisé pour mesurer la puissance maximale du panneau. Des tests électriques sont ensuite utilisés pour déterminer notamment sa résistance et l’intégrité du circuit.
S’il réussit le test, le panneau « seconde vie » sera immédiatement mis en vente. Particuliers, professionnels et collectivités peuvent acheter des panneaux d’occasion à l’unité ou par lots directement en usine, à un prix particulièrement abordable de 0,25€/Wc. Un panneau de 200 Wc se vend donc 50 euros, contre 150-250 euros pour un modèle neuf de même puissance. Ce qui réduit le coût des cellules solaires tout en évitant la mise au rebut de panneaux fonctionnels.
Des panneaux maltraités
Selon Frédéric Seguin, en très bon état, même la présence de panneaux neufs parmi des modèles réellement portés pour plusieurs raisons sans pouvoir être officiellement identifié. Par exemple, un assureur peut décider de remplacer l’ensemble de l’installation après un sinistre (souvent dû à la grêle) même si tous les panneaux ne sont pas endommagés. L’opérateur peut également choisir de moderniser la centrale solaire avec des panneaux plus puissants, même si les précédents fonctionnent toujours.
Un petit stock de panneaux de seconde vie. A noter : les panneaux de marque « Scheuten » ont finalement été retirés de la vente. / Photos : RE-HL.
Malheureusement, les panneaux n’ont pas toujours été soigneusement manipulés et transportés, regrette le gérant. De nombreux modules sont cassés en piles mal faites ou subissent de lourds impacts. Selon Frédéric Seguin, la ressource est gaspillée, alors que la demande de panneaux de seconde vie est forte.