Le froid est là. Depuis une dizaine d’années, les constructions utilisant la paille comme isolant se sont multipliées. Le matériau, qui protège à la fois du froid et de la chaleur, a également une durabilité exceptionnelle. Produite localement, la paille est également protégée des risques de pénurie. Article publié pour la première fois le 18 novembre.
« Nous voulions une maison écologique d’origine biologique et j’ai étudié toutes les possibilités pendant 3 ans. J’ai vu beaucoup de documentation sur la paille, je me suis dit que c’était un très bon isolant, produit localement. projet » déclare Dominique Bernard. Avec sa femme, ils ont fait construire la maison à Templeuve-en-Pévèle, dans le Nord, en 2019.
Chez les Bernard, la charpente de la maison est en bois et des bottes de paille intégrées qui assurent l’isolation sont posées sur la façade extérieure du bâtiment. « Ce n’est pas la chose la plus courante dans les bâtiments en paille », précise le retraité.
Dominique Bernard est dithyrambique dans son choix d’isolement. « On a un confort naturel qui est extraordinaire dans cette maison, je crois qu’on dit Feng Shui en japonais ? (rires) Et en plus c’est super en terme d’économie d’énergie. »
L’année dernière, je n’ai même pas eu besoin de consommer trois mètres cubes de bois. Cette année, nous n’avons pas encore allumé le chauffage.
Dominique Bernard, propriétaire d’une maison individuelle au toit de chaume
La construction de la maison au toit de chaume du couple Bernard, à Templeuve-en-Pévèle.
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© France Télévisions
En 2021, le chauffage d’un logement représentait près de 30 % de la consommation d’électricité, selon les données de l’Ademe compilées par France 3. Cette facture d’électricité ne cesse d’augmenter depuis 2006 et a augmenté de près de 240 € en 16 ans. Avec la hausse des prix de l’électricité et du gaz, la maison au toit de chaume est une alternative de plus en plus attractive.
Le compte de Dominique Bernard s’amenuise depuis qu’il a emménagé dans son nouveau logement. « Nous avons une toute petite cheminée pour chauffer toute la maison, c’est le plus petit modèle. Je précise que nous avons un plancher. L’année dernière, je n’ai même pas eu besoin de consommer trois mètres cubes de bois. Cette année, j’ai encore « Je n’ai pas allumé le chauffage. Je regarde désespérément, je vais au thermomètre et je me dis que dès qu’on descendra en dessous de 19 degrés, j’allumerai un feu. Mais ce n’est pas encore arrivé ! » il joue.
Le Centre de développement des éco-entreprises (Cd2e), basé à Loos-en-Gohelle, dans le nord, est fortement engagé dans cette alternative pour accélérer la transition écologique dans les Hauts-de-France. Vincent Thellier, consultant spécialisé dans les secteurs des sources biologiques :
« Le chaume offre une très bonne isolation et pourrait tendre vers le label Bâtiment Passif s’il est associé à de bons matériaux. Cela signifie que le bâtiment consomme moins de 15kW/h par an et par mètre carré », explique le spécialiste. Pour une maison de 100m² chauffée au gaz, cela représente une facture énergétique de seulement 120 euros par an.
Bâtisseurs autodidactes et passionnés subissent les déboires de la construction bois depuis plusieurs décennies. Ce savoir-faire accumulé a donné lieu à des règles professionnelles pour la construction en paille. « Nous avons un socle qui, s’il est suivi à la lettre, est un gage de succès », résume Vincent Thellier.
La maison biologique du couple Bernard, à Templeuve-en-Pévèle.
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© France Télévisions
« On utilise des bottes de paille très petites, environ 36 cm sur 46 cm. Avec deux petites bottes, on a une résistance thermique de premier ordre ! Maintenant on a des artisans qui fabriquent des pièces préfabriquées, préparent des pans de mur. maison, la structure bois et chaume se monte en moins d’une semaine. On gagne du temps et on a des chantiers propres. »
La paille doit être de la paille de blé, récoltée par des agriculteurs formés sur des presses spécialisées. Le pressage garantit une paille dense, sans bulles d’air. C’est cette densité qui assure une protection complète contre les aléas climatiques. Le froid, bien sûr, que l’on peut particulièrement redouter dans les Hauts-de-France, mais aussi la chaleur.
« Plus on se rapproche du réchauffement climatique avec de longs pics thermiques, plus ça devient intéressant, argumente l’expert consultant. Quand on a des épisodes météo comme cet été, c’est très efficace. Cela signifie qu’au moment où la chaleur atteint l’intérieur de la maison, la nuit sera déjà tombée à l’extérieur. »
Le matériau a de multiples intérêts au-delà de la conservation de la température. La paille est un excellent isolant acoustique et un régulateur hygrométrique naturel, un atout notamment pour lutter contre le développement des maladies respiratoires.
Le confort de l’habitant est ainsi assuré et la facture réduite. La paille a un autre grand avantage, celui d’être une ressource locale au bilan environnemental sans faille.
Dans les Hauts-de-France, premier gisement du pays, 7 millions de tonnes de paille sont produites annuellement. « Avec 1% de ce montant, on pourrait isoler plus de 25 000 appartements de 60 m² par an » concluent les études du Cd2e. La paille est le résultat de la photosynthèse, « donc la production de balles de paille stocke le carbone plutôt que d’en émettre. Nous sommes à l’opposé de la production de laine de verre, qui s’obtient en chauffant de la silice par exemple », illustre Vincent Thellier.