Depuis cinq mois, à Ivry-sur-Seine, en périphérie parisienne, près de 400 adolescents étrangers sont contraints de vivre dans un camp insalubre, surnommé « Liberty ». Alors que leur situation est ignoble et extrêmement alarmante, à ce jour aucune solution d’hébergement ne leur a été proposée.
Depuis le 10 juin, le nombre de tentes n’a cessé d’augmenter dans ce spot isolé de la périphérie du Val-de-Marne. Après avoir été évalués dans différents départements d’Ile-de-France, ces jeunes se sont vu refuser leur demande de reconnaissance de minorité et ont déposé un recours devant le juge des enfants.
Pendant l’appel, qui peut durer plusieurs mois, ils sont seuls et doivent survivre par eux-mêmes. Certains dorment dans des box, sans couvertures, entre deux tentes. « L’hiver arrive et les conditions s’aggravent. Beaucoup d’entre eux se plaignent de douleurs articulaires ou présentent des symptômes d’infections respiratoires. Des cas de pneumonie et d’engelures sont susceptibles de se développer avec l’hiver prochain. », prévient Jocelyn Nothomb, médecin bénévole MSF.
En raison du manque d’accès à l’eau et à l’assainissement, les conditions sanitaires déjà désastreuses dans le camp se sont encore détériorées. L’absence de ramassage des ordures et d’un nombre suffisant de toilettes crée des risques considérables pour la santé. Cette précarité est exacerbée par le manque d’accès à la nourriture. Sans pouvoir subvenir à leurs besoins de base, ces jeunes se retrouvent dans un état de misère extrême. Seuls les associations et les bénévoles se sont mobilisés pour garantir la distribution des repas, satisfaire leurs besoins quotidiens, fournir les produits de première nécessité et l’assistance médicale.
« Ce camp est situé loin de tous les services et l’accès à la nourriture, aux soins, aux droits et aux informations sur ce camp est plus difficile que jamais. Les jeunes sont très tristes. Ils ne comprennent pas pourquoi ils sont dans cette situation qui ne fait que se détériorer depuis cinq mois », explique Fanny El Boury, assistante sociale MSF.
Nour*, jeune Afghan boudé par sa minorité, a fui les talibans et vit sous une tente jusqu’à ce qu’il retrouve sa sœur en Angleterre. Epuisé par les nuits blanches, il se rend chaque jour au centre de jour MSF de Pantin pour se reposer et prendre un repas chaud. « Nous n’avons qu’un seul repas par jour. Quand quelqu’un nous apporte un sandwich, c’est une course à la survie : ceux qui ne peuvent pas manger un morceau se couchent affamés. Je ne pensais pas qu’en France je souffrirais autant », explique-t-il.
Comme Non, les jeunes de ce camp ont été confrontés à des situations de rupture ou de violence dans leur pays d’origine ou le long de la route migratoire. Beaucoup sont passés par la route migratoire la plus dangereuse, celle de la Méditerranée centrale, et ont vécu l’enfer de la Libye. Après un voyage souvent traumatisant et violent, ils font face à la politique de non-accueil de la France, qui devrait protéger les mineurs sur son territoire en vertu du principe de présomption de minorité, comme le prévoit la Convention internationale des droits de l’enfant, dont le pays est signataire.
L’équipe de Médecins Sans Frontières a mis en place une clinique mobile pour évaluer l’état de santé de ces jeunes. Un travailleur social informe les jeunes de leurs droits et les oriente vers les points d’accès aux services de base pour répondre à leurs besoins de base.
A ce jour, ni le département ni l’Etat ne sont intervenus pour offrir un abri ou une aide concrète à ces jeunes. « Comment voulez-vous qu’ils soient pris en charge lorsque ces jeunes dorment dans la rue ? s’indigne Jocelyn Nothomb.