Privé de majorité absolue et de perspective de réélection, le président de la République semble davantage se préoccuper de l’international que des affaires intérieures depuis le début de son quinquennat. Une situation qui inquiète certains au sommet de l’État.
Emmanuel Macron déjeune ce mercredi avec le chancelier allemand Olaf Scholz à l’Élysée. Le week-end dernier, il était à Rome où il s’est entretenu avec le pape François et a rencontré Georgia Meloni, la nouvelle Premier ministre italienne d’extrême droite. Ceci pourrez vous intéresser : Il laisse son fils de 4 ans en sous-vêtement pendant une heure sur le balcon pour « dormir paisiblement ». La séquence n’est pas sans confirmer une impression de sa réélection : celle d’un président qui souhaite se concentrer sur l’international plutôt que sur l’intérieur.
Son second mandat débute sous des auspices très différents du précédent. Fini la majorité absolue au Palais Bourbon et l’effervescence de la perspective d’une réélection. Alors que les crises s’enchaînent et se superposent – ce qui entraîne le manque de carburant des derniers jours et maintenant les mouvements de grève – le gouvernement a pourtant besoin de ses arbitrages, voire de ses recadrages. Dans ce contexte, Emmanuel Macron aura-t-il le bleu ?
« Montrer qu’il est encore aux manettes »
Pour le président de la République, le doute est entré au soir de sa victoire à la présidentielle face à Marine Le Pen le 24 avril. Emmanuel Macron avait l’air heureux, mais pas vraiment heureux. Ceci pourrez vous intéresser : Santé : 10 accessoires pour bien dormir. Les proches avaient déménagé à ce moment-là.
« Rien à voir avec 2017 », disait un récit de la première campagne présidentielle. « La conquête n’est plus là », en voit-on un autre.
Deuxième avertissement : les élections législatives. Le président fait peu campagne. A l’issue du second tour, il ne semble pas se rendre compte de ce que signifie la perte de sa majorité absolue. « Élisabeth Borne a eu fort à faire pour comprendre les risques : un pays bloqué, des motions de censure », raconte un pilier de la majorité. Et de poursuivre : « Evada, il a dit que ce n’était pas si grave… et puis il a pris le coup ».
Depuis la rentrée, le président ne semble plus avoir tout de suite « la » bonne idée pour résoudre les crises.
Un membre de la majorité centrale cite en exemple le récent Fuel Defence Council. « Il n’en est pas vraiment sorti avec une décision », note-t-il. « On a compris que c’était surtout pour montrer qu’il était toujours responsable… pour lui montrer, avant tout. » Notre interlocuteur insiste : « Les avocats de la défense, c’est sa spécialité d’habitude !
« Comme un Churchill déprimé »
Certains députés s’interrogent également sur les thèmes choisis par Emmanuel Macron ainsi que leurs intitulés. « La fin de l’abondance, la retraite, la fin de la vie. Sur le même sujet : Comment protéger ses cheveux du froid ?… c’est un lexique dépressif ! », juge figure de la majorité.
« Il a toujours eu l’habitude de rendre exaltants les défis les plus difficiles, et là… Même le plan sobriété, on aurait pu le présenter comme une chance de faire le changement écologique. C’est comme ça que l’ancien Macron le présentait… Ici on la présente comme une Churchill déprimée », il reprend son souffle.
Plusieurs membres du gouvernement le demandent. « Je pense qu’il préfère se concentrer sur l’international », a déclaré un ministre. « Peut-être aurait-il préféré un second mandat à Chirac, très porté sur la diplomatie », confirme un autre. Avant de qualifier : « Mais les crises se succèdent et j’ai l’habitude que tout le monde soit là quand ça frappe. »
Un ministre voit les choses différemment. « Je réponds à ceux qui disent qu’il préfère ne parler que des internationaux, ce n’est pas mon sentiment », a-t-il déclaré. Et d’ajouter : « J’ai travaillé une partie de la matinée sur la réforme des retraites et c’était focalisé là-dessus. Et très mobilisé. »
Un autre membre du gouvernement va dans le même sens : « Quand je vois (Emmanuel Macron) en Conseil des ministres, il ne donne pas l’impression d’être déconnecté ». Notre source reconnaît dans la foulée qu’il y a cependant des « problèmes internes de partition » et « des musiques différentes dans l’orchestre ». « C’est peut-être ce qui renforce cette impression », dit-il.
« Il sait qu’il joue gros » sur sa succession
Comme ces ministres, plusieurs membres du camp présidentiel rejettent l’idée d’un éventuel Emmanuel Macron bleu. Un pilier de la majorité est porté : « C’est un non-sens ! Il n’a rien perdu de son ambition réformatrice. Ceux qui le disent veulent fragiliser son image ». Selon un autre membre de la majorité, cette idée de « dépression » vient de ceux qui entendent contester la succession d’Emmanuel Macron.
« Ceux qui envisagent de suivre le président dans un premier temps le seront à leurs dépens, c’est toute la majorité qui sera fragilisée », prévient notre source.
Sa succession, Emmanuel Macron y pense. Pourtant, ce n’est pas la personne qui va le remplacer qui l’inquiète, mais plutôt le parti. Le chef de l’Etat a une « obsession » : « ne pas être le président qui a donné les clés du pays pour le Rassemblement national ».
« Bien sûr, il sait qu’il joue gros. Bien sûr, il ne veut pas qu’on se souvienne seulement que si malheureusement ça arrivait. Il réfléchit, il observe », explique un habitué d’Emmanuel Macron.
À la recherche d’un second souffle
Il cherche un second souffle. Mais, jusqu’à présent, ses tentatives ne fonctionnent pas aussi bien que prévu. Exemple : le Conseil national pour la reconstruction (CNR), totem de la « nouvelle méthode » faite de plus de concertations, sollicitée par Emmanuel Macron.
Avec cette instance politique, le chef de l’Etat a voulu réunir autour d’une même table « les forces politiques, économiques, sociales, associées, les élus des territoires et les citoyens tirés au sort ». Perdu. Les oppositions, qui l’accusent de vouloir s’évader du Parlement, lui ont envoyé la fin d’irrecevabilité.
« On a bien compris avec le CNR, qu’il voulait revenir aux principes fondamentaux qui ont fait son lancement : le débat, l’évocation de la résistance. Mais ça n’a pas pris. En tout cas, pas dans l’avis », reconnaît un proche. .
Un proche d’Emmanuel Macron résume l’équation :
« Il est freiné en Ukraine par l’entêtement de Poutine, freiné dans sa volonté de réforme par une Assemblée sur laquelle il n’a plus la main, sans perspective de réélection. Il doit se relancer. Mais comment ?
Emmanuel Macron aura en tout cas l’occasion de s’exprimer ce mercredi soir lors d’une interview sur France 2. Et cette fois, les thématiques seront nationales et non internationales.
Article original publié sur BFMTV.com
VIDÉO – Emmanuel Macron demande une « possible » paix en Ukraine, lors du sommet organisé par Sant’Egidio