« J’ai encore beaucoup de choses à écrire, je n’ai pas fini », assure Michel…

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Chaque jour, une personnalité s’invite dans l’univers d’Élodie Suigo. Aujourd’hui, l’acteur, comédien et réalisateur, Michel Boujenah. Depuis le 26 janvier 2023, il est sur scène au théâtre de la Madeleine à Paris avec « Adieu les Magnifiques ».

Michel Boujenah est un acteur, comédien et réalisateur franco-tunisien. Acteur, c’était le point de départ, un rêve d’enfance puis d’adolescence. Un rêve devenu réalité. En parlant de lui, impossible de ne pas citer les films Trois hommes et un couffin de Coline Serreau (1985), pour lesquels il a reçu le César du meilleur segment d’acteur, Le nombril du monde d’Ariel Zeitoun (1994) ou encore Les clés. vers la voiture de Laurent Baffie (2003). Sa première production fut le film Père et fils en 2003, puis il y aura Trois amis en 2007 et Le Cœur en braille en 2016.

En 1983, il fait son one man show Les Magnifiques et à cette époque il avait promis à son public de venir jouer ce spectacle tous les 20 ans. Cela a été fait en 2003 avec The New Magnificents. En 2023, il tient encore parole avec Adieu les Magnifiques sur la scène du Théâtre de la Madeleine à Paris. Il a donné son spectacle du 26 janvier 2023 au 5 mars pour 50 représentations exceptionnelles avant de partir en tournée.

franceinfo : Cette émission est particulière car il y a un mot qu’on n’entend pas habituellement quand on parle de toi, c’est le mot « adieu ». Pourquoi ce mot ?

Michel Boujenah : Tout simplement parce que c’est le dernier volet de ce que je peux appeler une trilogie. Dans 20 ans, j’aurai 90 ans alors oubliez ça ! Puis avec mes trois héros légendaires, mes quatre parce que maintenant il y a Simone Boutboul, il y a leurs petits-enfants. Et les garçons et les filles qui ont maintenant entre 20 et 30 ans parlent à leurs grands-parents. L’incompréhension entre ces générations est incroyable. Cet écart, c’est évidemment drôle, ça fait rire, mais en même temps, c’est une photo de ce que je vois de la génération de mes enfants.

Cette photo, en fait, au départ, concernait trois juifs tunisiens qui ont émigré en France et en même temps, elle est toujours d’actualité.

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Je pense qu’au fond, les questions de mémoire et de souvenir évoluent avec le temps. Mais la question reste la même. Vous ne pouvez pas savoir où vous allez si vous oubliez d’où vous venez. Ce spectacle, pour moi, représente cela. Il représente ma culture, à travers mes personnages qui sont des petits vendeurs de pantalons, qui viennent de Tunisie et vivent en France. Et donc puisque c’est moi qui écris la série, je suis un peu comme le bon Dieu. Alors, je fais parler le bon Dieu et je leur dis : « Vous ne pouvez pas mourir, vous êtes éternels s’il n’y a pas un de vos enfants qui n’ait repris le flambeau de la mémoire ».

Le théâtre s’est imposé très vite pour vous. C’est vrai que tu as toujours voulu être acteur. Avez-vous réalisé tout de suite que cela faisait partie de vous, que c’était votre métier ?

Non. Parce que je n’ai pas osé. D’abord, je voulais être médecin comme mon père. Et d’ailleurs, je pense que peut-être que si j’avais été médecin, j’aurais peut-être été plus heureux, c’est-à-dire que ce métier, je ne l’ai pas choisi, je l’ai choisi, il s’est imposé et il fallait que je le fasse, sinon J’aurais fait ma vie.

« A 17 ans je rêvais d’être acteur, mais je n’osais pas me l’avouer. Un jour je me suis dit : continue, essaie, essaie même si tout est contre toi. »

Dans ton évolution, il y a eu cet énorme travail avec les enfants. Ce n’est pas du tout un détail car c’était l’élément fondateur de votre capacité à raconter des histoires.

En fait, quand j’ai commencé à travailler avec des enfants, j’avais vingt ans. Je les ai vus faire leur show. Un jour j’ai fait ce qu’ils m’ont montré, j’ai fait ce qu’ils ont fait et ça a marché. Ce jour-là, j’ai quitté les enfants avec qui j’avais travaillé pendant huit ans, comme si j’avais trouvé ce que je cherchais depuis si longtemps.

Albert était votre premier spectacle basé sur cette enfance et ses racines. Vous avez connu un succès immédiat. Comment l’avez-vous vécu ?

Au début, étonnamment bien. Après, au bout de deux, deux ans et demi, je me suis dit : mais je ne suis pas l’enfant de cette émission. Un peu avec tout ce spectacle. J’ai fait une grosse erreur car je pouvais rompre avec le spectacle, mais pas rompre avec ce qu’il y avait dans le spectacle qui faisait mon identité, même artistique.

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The Magnificents, c’est une question d’identité !

Oui et ça arrive après ce gros échec qui s’appelait Anatole, mon deuxième spectacle qui était un flop. Vous ne pouvez pas imaginer ce qu’est un flop à ce niveau. Les gars dans la pièce, ils disaient : « Joue l’ancien, c’était mieux ! » Un jour, je me suis écrit une lettre et je me dis : tu voulais t’appeler Anatole France ? Et je me suis dit : tu crois qu’il suffit de prendre le nom des autres pour que le sang qui coule dans tes veines soit le sang des autres ? De cette phrase est sorti un long texte qui est une lettre d’un père à un fils et j’ai écrit cette histoire sur la mémoire et sur les trois anciens. J’ai écrit Le Magnifique. C’était incroyable. Comme quoi les échecs sont très fertiles. J’ai très mal vécu ce succès car le succès donne des ailes ou étouffe.

C’est ce qui s’est passé avec Three Men and a Bassinet ou pas ?

Oui bien sûr. Il n’y avait aucun pays en Europe où je pouvais marcher dans la rue.

« Le succès de ‘Trois hommes et un bassinet’ m’a complètement déséquilibré. Tout le monde m’a reconnu. Je ne m’attendais pas à tout ça et d’ailleurs, ce n’est pas forcément ce que je cherchais.

Comment voyez-vous cette carrière, ce parcours ?

Aujourd’hui, franchement, j’ai l’impression que je n’ai toujours pas fait ce que j’aurais dû faire. Je jure que c’est vrai, pas de fausse pudeur. Le sentiment d’insatisfaction que j’ai vis-à-vis de mon travail est énorme. Je rêve de jouer Deburau. Je rêve de dire au revoir au Magnifique, que ça marche et que les gens comprennent pourquoi je fais ce dernier volet de la trilogie.

Je rêve de faire au moins deux autres films en tant que réalisateur. J’ai de nombreux projets et j’aimerais traverser l’Atlantique en bateau. Je rêve que je peux refaire beaucoup de choses, que tout ira bien. J’ai encore beaucoup de choses à écrire, je n’ai pas encore fini. Tu sais, je ressemble au lapin d’Alice au pays des merveilles, je suis en retard, je suis tout le temps en retard.