Caudan (France) (AFP) – « Vivre de ses produits, c’est bien ! », s’enthousiasme Jean-Marie Moëllo au milieu de sa parcelle ensoleillée. Depuis deux ans, cet ancien camionneur cultive du chanvre pour produire du cannabidiol, ou CBD, un « cannabis light » légal dont l’usage est en plein essor en France.
Il n’a pas toujours connu ce milieu de travail : Jean-Marie Moëllo, 36 ans, a conduit des camions pendant sept ans, avant d’entamer une reconversion professionnelle en parallèle de ses chantiers. Le bitume, « n’a pas la même odeur », sourit le trentenaire.
C’est lorsqu’il tombe sur une publication Facebook en 2018 qu’il songe à changer de métier. Après un parcours du combattant, convaincre une banque ou comprendre la législation en vigueur, M. Moëllo a rejoint le petit mais grandissant club des néoculteurs du CBD.
« Ce marché attire tellement de monde qu’il faut y être le plus tôt possible », observe-t-il parmi ses plantes.
« Mon objectif est de récolter 50 kilos de fleurs en octobre, afin de gagner 50 000 euros », explique le nouvel agriculteur, installé en Bretagne, dans l’ouest de la France.
Selon le syndicat du chanvre, le nombre de producteurs est passé de seulement 50 en 2018 à environ 600 aujourd’hui. Et parmi eux, « 30 à 40 % sont des néo-agriculteurs », explique Aurélien Delecroix, président du syndicat. « Il y a encore beaucoup d’amateurs de cannabis en France, ne nous le cachons pas : pouvoir cultiver du cannabis légalement a suscité de nombreuses vocations », poursuit M. Delecroix.
Car c’est la même plante : le chanvre. La principale différence entre le cannabis récréatif et le CBD, le chanvre dit « bien-être » ou « cannabis light », est la teneur en tétrahydrocannabinol (THC), la molécule aux effets psychoactifs. Le seuil à ne pas dépasser en France est de 0,3% de THC.
« L’aspect réglementaire et légal a ralenti l’évolution du nombre de producteurs. Il faut comprendre que jusqu’en novembre 2020 les producteurs encouraient une sanction pour trafic de drogue », explique Aurélien Delecroix.
– « Le CBD a de beaux jours devant lui » –
Le tournant, selon lui, est le « deal Kanavape », une e-cigarette avec une huile contenant du CBD, qui avait valu une peine de prison avec sursis à ses créateurs.
L’affaire parvient devant la Cour de justice de l’Union européenne, qui rend son arrêt en novembre 2020 : le CBD ne peut être considéré comme un stupéfiant, car « il n’a pas d’effets psychotropes ni d’effets nocifs sur la santé humaine ».
La France, contrainte de respecter le principe de la libre circulation des biens et des services, ne peut donc interdire leur commercialisation.
« L’affaire Kanavape nous a remotivés et redonné espoir », explique Jean-Marie Moëllo, qui déplore néanmoins les « zones grises » concernant la législation CBD. En décembre, la vente de fleurs a été interdite par le gouvernement avant d’être à nouveau autorisée par le Conseil d’Etat.
« C’est difficile de se projeter », se plaint le nouvel agriculteur. « Je fais comme ça vient, mais si la législation devient trop contraignante un jour, je repasserai chez les poids lourds, donc je suis plutôt +no stress+ », poursuit-il.
« Pour le moment, je suis dans mon droit et ça me fait plaisir de faire du bien aux gens », confie M. Moëllo, qui cite parmi ses clients un homme qui n’a plus de migraine ophtalmique depuis qu’il consomme son CBD ou une femme qui en souffre. moins de son arthrose. « Je ne suis pas médecin, mais il fait son travail ! proclame fièrement.
S’il reste prudent en attendant de voir comment la législation va évoluer, Jean-Marie Moëllo est confiant : « Quand on voit la situation économique actuelle, quand on voit le nombre de maux dont souffrent les gens, je me dis que le CBD a du bon jours. devant lui. «