Sur le site saumurois de l’IFCE, Alain Bahuchet – Président de l’association ouvre l’assemblée générale 2023 entouré de personnalités de l’Attelage de Tradition. Ils sont une bonne vingtaine : membres du bureau, organisateurs de concours, rallyes et rassemblements, spécialistes du patrimoine, animateurs, collectionneurs, nombreux experts chacun dans leur spécialité… André et Nicky Grassart, Jacques Dumont, Louis Basty, Patrice Biget, Francis Lemaitre, Jean-Pierre Gay, Marie-Anne Privat, Mickaël Quincé, François Tessiot sont entre autres présents.
Les premiers constats, suite à l’information de la bonne santé financière de l’association, constatent l’état de la flotte hippomobile du patrimoine français. Le manque de savoir-faire dans l’entretien des particuliers propriétaires de voitures d’exception, des trésors soumis à l’épreuve du temps dans des lieux de stockage inadaptés, la rareté des professionnels spécialisés dans la restauration de pièces, le cas des artisans charrons, selliers… Dans sa dernière « Lettre de l’AFA », un article de l’ancien conservateur du patrimoine Jean-Louis Libourel dresse un angoissant inventaire des dernières grandes collections privées françaises dispersées à la mort de leur propriétaire. Celles d’André Becker, Dina Vierny, Baron Julien Casier, Frédéric Piveteau. A noter que la collection Louis Lacroix, en revanche, est conservée et exposée au public, à Marcigny (71), grâce au travail remarquable de son fils Franck.
Conscient à plusieurs niveaux de la nécessité de valoriser et de préserver notre patrimoine matériel et immatériel, l’IFCE et son Pôle Equitation de Tradition Française – dont la gestion incombe à l’Ecuyer en Chef du Cadre Noir de Saumur, – intervient au sein du Comité culture, patrimoine et UNESCO de l’IFCE. M. François Huot-Marchand, adjoint au colonel Vallette, est chargé des missions pour les affaires patrimoniales ; Il se réjouit du développement des relations entre l’Institut et les Meilleurs Ouvriers de France. « Certains métiers sont en tension, comme celui d’artisan charron traditionnel. Le charron moderne fait partie des disciplines du compagnonnage actuel, nous cherchons donc des moyens de préserver le savoir-faire. Pourquoi ne pas imaginer une spécialisation dans un des métiers déjà présents au sein des MOF ? Le métier de charron s’apparenterait à celui de charpentier de marine, ébéniste. On en est encore au début, mais les liens se créent, les réflexions s’échangent, c’est encourageant.
« Chefs d’œuvre en péril », vers la sortie de crise
L’affaire remonte à 2019 et fait la une de « National Stud Cars : Masterpieces in Peril »*. Dans une lettre publiée dans la presse spécialisée de l’attelage, une tribune est ouverte par nos plus grands experts. François Durand, gérant du groupe Diligence presse, Jean-Louis Libourel, conservateur du patrimoine à la retraite, André Grassard ancien Grand Reporter, Tanneguy de Sainte-Marie, ancien gérant du Domaine du Pin, vice-président hippomobile Christian Depuille… Tous sonnent la sonnette d’alarme… jusqu’à la conclusion d’Alain Bahuchet pour l’AFA « Lettre du président Alain Bahuchet à M. A voir aussi : Propriété équestre à l’est de Rouen. Jean-Roch Gaillet, directeur général de l’IFCE ».
Les agents actifs de l’IFCE, en tant que retraités du Haras, qui ont participé aux opérations « spontanées » de sauvegarde du patrimoine hippomobile expliquent longuement avec précision comment les faits se sont déroulés. Lors des fermetures, récupérez les voitures et trouvez-leur un espace de stockage sécurisé. Des équipes qui se mobilisent notamment sous l’impulsion de Philippe Roche, Louis Basty, Jean-Louis Libourel, Jacques Tamalet pour ne citer qu’eux…Suivez l’inventaire connu, selon l’anecdote « trouver une fois une voiture annoncée brûlée dans une réserve réservée » sic… Identifier les monuments historiques, se renseigner auprès des représentations locales, châteaux et musées si certains sont intéressés et peuvent accueillir certains véhicules dans de bonnes conditions. Répertorier et pucer les voitures. Surveiller l’état lors des phases transitoires de stockage. Vider tout le hangar, effectuer un dépoussiérer, protéger le tout, procéder à trois jours de fumigation de la réserve, installer des bâches, des protections… Remarquant des bricolages ici et là… des choix de peinture parfois très discutables… parfois un état dégénératif bien avancé à l’arrivée des véhicules.
La présentation de François Huot-Marchand qui suit est rassurante. Ainsi au titre de « Conservation Restauration », il s’agit de : « sauvegarder le patrimoine culturel matériel et immatériel tout en garantissant son accessibilité aux générations présentes et futures ». Le management en bon père de famille après tout. Au programme, un plan de conservation et de restauration des véhicules hippomobiles, une collection de documents et d’archives patrimoniales et l’accueil et la conduite d’études scientifiques. La prise de conscience de l’Institut et sa volonté de prendre les choses en main semblent significatives.
Dans la salle, les avis s’échangent. Les plus pragmatiques résonnent. Les carrossiers ont toujours remis en état certaines pièces d’occasion d’un véhicule qui ne passeraient pas son contrôle technique… Sauf pièces exceptionnelles particulièrement rares bien sûr. Mais qu’en est-il dans un garage de 10 voitures avec une – prête pour la ferraille et une – avec un phare manquant, en prenant une pièce de A à la réhabilitation B ? Cordialement… Et dans la cave, les 20 fûts faits à la main par le grand-père, qui prendrait le 21ème en phase avancée de décomposition pour le mettre sous verre et l’exposer ? A l’heure où tout vient d’une communication perpétuelle, la force de ce tableau est dans l’exactitude et la rationalité.
La suite de la présentation des nouvelles politiques du « Patrimoine Commun » révèle les objectifs de finalisation de l’inventaire et d’initiation d’un processus hiérarchisé et pluriannuel de restauration et de valorisation des véhicules, comme l’animation d’un réseau de gestionnaires ou de propriétaires pour mettre en valeur à la fois les voitures et le savoir-faire associé. Enfin, au titre des actions phares, un « guide pour la conservation et l’entretien des collections hippomobiles » et le déploiement de la campagne de fumigation… Il semble que l’appel de nos experts ait été entendu.
Sur un autre sujet, plusieurs leaders représentant la relève de l’Attelage de traditions souhaitent prendre la parole. Il est demandé la possibilité de mettre en place des commentaires avec les grilles de notation des compétitions. Humainement, face à l’engagement et à l’investissement d’une telle passion-loisir, mettre autant de cœur à préparer pour la longue année son équipe et ses sorties, et terminer une compétition sur une feuille de notes, pas toujours digeste d’ailleurs… C’est porté à la connaissance de l’association que plus d’échanges sur les compétitions, l’accueil de nouveaux arrivants serait très apprécié, afin de comprendre, de se sentir partie prenante, de grandir et d’évoluer ensemble. Il semblerait que contrairement à la conduite sportive où la mixité générationnelle est un très bel exemple de dynamique familiale, la conduite traditionnelle peine à trouver sa relève de leaders, qui cherche sa place…
Clôturant cette assemblée, la présentation du cas de restauration d’un harnais du 18ème siècle présenté par le spécialiste et Conservateur du Musée National de l’Automobile de Compiègne. Marie-Anne Privat détaille dans sa présentation qu’avec chaque voiture venait un jeu de harnais reprenant chaque détail de la décoration, les harmonies des cuirs, les incrustations, et qu’ainsi – en fait – ce n’est pas seulement le véhicule en lui-même à être considéré qu’un ensemble d’équipements et de harnais connexes. Les harnachements restaurés sont exposés sur un socle en forme de cheval « Les accrocher dans la vitrine les déforme par la pression du poids exercé sur les cuirs ». Le principe d’équilibre et de répartition des charges est donc essentiel. Parfait exemple de réussite, le Musée de Compiègne est une référence en la matière en termes de collaborations entre le monde associatif et l’Etat et ses représentants.
Une rencontre qui se poursuit par un déjeuner convivial et raffiné offert par le Directeur de l’Institut, avant de repartir à quelques kilomètres à la redécouverte de la collection hippomobile Bouvet Ladubay. Une vingtaine de véhicules composent l’ensemble grâce à un travail considérable et à l’alliance de trois acteurs, la Maison Saumuroise, l’IFCE et l’association Saumur Attelage.
Une adhésion très utile à cette association à l’heure où les médias professionnels spécialisés se raréfient, une newsletter mensuelle particulièrement instructive et intéressante par des experts toujours très actifs, des conseils techniques, des horaires de concours, des contacts intéressants, des hommages, des personnalités, des collections.. Si vous ne le savez pas encore, tous les groupes d’attelage accueillent des bénévoles pour des concours, des stages d’initiation, de perfectionnement au ménage, des écoles ; Des formations pour devenir juge existent aussi en France, renseignez-vous, la discipline recrute !
Au programme 2023, sous réserve de modifications
Concours internationaux d’attelage traditionnel : CUTS à Compiègne (60) les 20-21 mai, Chambord (41) les 14-15-16 juillet, Caussade (82) le 22 juillet, Le Pin-au-Haras (61) le 23 juillet, Villefranche-de-Rouergue (12) du 13 au 15 août, Trançais (03) les 19 et 20 août, Amboise (37) le 10 septembre, et Uzès (30) les 21 et 22 octobre 2023.
Rallyes et rassemblements : La Route Eugénie au départ de Compiègne (60) les 22 et 23 avril, Rallyes des Cuves – Sassenage (38) le 23 avril, Rallye autour des châteaux et villages de charme de Saumur – Saumur (49) du 6 au 8 mai, Rallye de La Brie (77) les 5 et 6 août ; Rallye du Boulonnais – Enquin-sur-Ballons (62), Courses du Pin (61), les 7 et 8 octobre.
Plus d’informations et contact : afa.info@laposte.net afa.tradition@orange.fr
Mélanie GuillamotSources : Reportages « Chefs-d’œuvre en péril » Attelages magazine n°120, février mars 2019