Le CBD, cette machine à « fantaisie » et à « amalgamation » qui « cristallise les tensions »

Written By Sara Rosso

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Le CBD, c’est comme la sélection de Karim Benzema en équipe de France : beaucoup ne savent pas ce qu’il y a dedans et ce qui ne l’est pas, mais beaucoup ont encore un avis. Alors quand le Conseil d’État, ce mardi, a de nouveau approuvé la vente de produits dérivés du CBD, tous les Français ont été autorisés à commenter. Le langage était lâche et chacun offrait son petit avis. Mais pourquoi? Tout simplement parce que « l’imaginaire des drogues est très présent en France, et même plus que celui du cannabis : il renvoie à plus d’idées et d’idées reçues que l’héroïne ou l’ecstasy par exemple », développe Henri Bergeron, directeur de recherche au CNRS et auteur de la Sociologie des drogues. (La Découverte, 2009).

Contrairement aux drogues dures, le cannabis « fait partie du quotidien et de la société, en plus de la référence à l’imaginaire de l’insécurité dans les quartiers difficiles », estime l’expert, interrogé par 20 Minutes. En effet, lorsque le sujet revient sur la table, difficile de ne pas voir la polémique. Interrogé par France Inter mardi matin, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin a lui-même lâché le sulfate d’assurance « regrettant » l’élection du Conseil d’Etat. « En général, toutes les substances relevant du cannabis, les drogues, sont très mauvaises pour la santé. On n’a pas augmenté le prix du tabac de dix euros pour accepter la légalisation, la punition du cannabis », a-t-il déclaré, certainement aussi impressionné par les clichés populaires. .

« En France, la drogue a tout d’un positionnement partisan »

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Pour cette raison « je n’ai pas de science, mais tout curseur politique, a fortiori en année électorale », accuse Henri Bergeron. Selon le directeur de recherche, les partis politiques de droite ou ceux qui ont les yeux rivés sur ces électeurs – comme LREM à la présidentielle – n’ont aucun intérêt à jouer avec l’ouverture des médicaments, alors que la base des électeurs y est fortement opposée. A voir aussi : Entreprises : les patrons misent sur l’aide sociale pour retenir leurs salariés. . . « En France, la drogue a tout ce qui est une position de parti : soit on est contre, soit on est contre. Des jugements, pas un débat sanitaire », conclut l’auteur.

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Les Français ont donc tendance à ignorer la littérature scientifique grandissante sur le cannabis et à miser sur l’éthique, mettant souvent la voiture avant l’herbe, comme l’explique Zoë Dubus. « L’information sur la substance est biaisée », estime une doctorante en histoire moderne dont les recherches portent sur les politiques de santé liées à l’usage des médicaments psychiatriques largement repris par les médias ou les politiques, mais qui relèvent plus de l’actualité que de la réalité. Par conséquent, « les médicaments font parler tous les Français parce que c’est une question d’éthique, qui radicalise le débat et l’entache de considérations non scientifiques ».

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Requiem for a législation

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La science est donc vraiment la grande partie oubliée du débat sur l’épiderme. Le problème, selon nos experts, a une base juridique, comme nous l’avons déjà vu, de manière politique et morale, bien plus que scientifique. « Les Français se mettent en opposition avec la loi actuelle, qui fait monter les tensions. Cette loi ne se base sur aucune santé, on l’attaque ou on la défend sans appeler le scientifique. Ceci pourrez vous intéresser : Le Conseil d’État a levé l’interdiction de vente de fleurs CBD en France. Ça ne fait qu’aggraver le débat », estime Zoë Dubus. Le doctorant poursuit : « Plus le temps passe, plus il y a un consensus scientifique sur l’usage thérapeutique de certains médicaments ou sur les risques non dangereux de certains usages. Mais revenir à la loi serait admettre que depuis de nombreuses années était sur la mauvaise voie, ce qui est impossible. »

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Nos deux experts le reconnaissent, la lecture scientifique de ce sujet, nombreux, est difficile. Ce qui peut en frustrer plus d’un et expliquer la tentation du jugement moral, plus accessible et relaxant. Zoë Dubus décrit : « Les substances illicites sont moins dangereuses pour la santé que les substances légales, comme l’alcool ou le tabac. Afin de se faire plaisir, beaucoup essaient de conserver leurs vieilles idées pour ne pas nuire à leurs fondements. »

Il suffit d’écouter à nouveau Gérald Darmanin pour s’en convaincre, confie Henri Bergeron : « Entre CBD, THC, cannabis récréatif, il est facile de tout perdre ou de tout combiner. » Quand il s’agit d’arrêter le cannabis pour stimuler la vente de CBD, le ministre de l’Intérieur fait une combinaison et une mauvaise interprétation. Mais qui saura ? »

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Publié le 9 décembre 2022 à 06:01 Mis à jour le 9…