Renaud Chantegrelet est un homme pressé. Entre ses trois restaurants (dont le célèbre « Paulette » au 110 rue Camille Desmoulins) et sa passion du vol, cet homme de 40 ans est en perpétuel mouvement. Lorsque nous le rencontrons fin mars, il vient nous chercher dans son pick-up, nous propose de faire l’interview chez « Paulette », avant de se raviser pour se diriger vers l’héliport. Quelques minutes plus tard – et quelques copilotes nous ont salués au passage – nous croisons les locaux d’un engin sans prétention situé devant la piste : une Alouette-2, son hélicoptère.
Un rêve d’enfant
Héliport d’Issy-les-Moulineaux, Renaud Chantegrelet le connaît bien. « Depuis que je suis tout petit, mes parents m’emmenaient le dimanche au parc de Saint Cloud et passaient devant l’héliport. J’ai toujours été fasciné par ces engins. Alors même aujourd’hui, quand je vais quelque part, je me débrouille toujours à marcher devant. Sur le même sujet : Les 5 articles high-tech qui feront de vous l’athlète de demain. Originaire de Nasbinals sur le plateau de l’Aubrac, peu intéressé par une carrière scolaire, il devient à 18 ans le plus jeune buraliste de France en ouvrant une cave à cigares à Bercy Village, qu’il dirigera pendant 7 ans. Son ambition professionnelle est d’ouvrir un restaurant et il y parviendra 9 ans plus tard avec une première enseigne à Boulogne-Billancourt. Hors association avec la ville d’Issy-les-Moulineaux et son héliport, il a voulu ouvrir un restaurant à proximité. Il trouvera l’idéal repérage quelque temps plus tard, dans l’axe exact et sur le final de la piste de l’héliport d’Issy, d’où il verra arriver et repartir les hélicoptères.
Un rêve brisé
Le 6 mars 1994, à l’âge de 14 ans, Renaud Chantegrelet est victime d’un accident de motocross à Nemours. Les pompiers le prennent par la main, puis le SAMU, qui l’emmène à l’hôpital de Nemours. Sa moelle épinière est comprimée : il a besoin d’être transféré. C’est ce jour-là qu’il effectue son premier vol en hélicoptère à bord du dispositif de la sécurité civile, qui le conduit à l’hôpital de Garches. Voir l’article : Haute Savoie. Un hélicoptère pour huit femmes de 82 à 98 ans. Toutes les opérations de sauvetage prendront 9 heures, sa moelle épinière fera un œdème quelques jours plus tard provoquant une paraplégie partielle permanente. Il passe un an à l’hôpital de Garches à l’âge de 14-15 ans, subit plusieurs opérations et passe son Certificat Universitaire.
Hier, il y a eu un accident à Fontainebleau. La sécurité civile a décollé d’Issy 5 minutes après avoir été alertée et est revenue 35 minutes plus tard pour livrer les blessés à l’hôpital Georges Pompidou. C’est incroyable. L’héliport de Paris-Issy est important car il sauve des vies. Je suis donc l’un de ses grands défenseurs.
Un rêve d’adulte
Renaud Chantegrelet aime le sport automobile. Malgré son handicap, il s’adonne à de nombreuses disciplines – quad, kart, ski – car la passion ne s’arrête jamais. Il commence à voler en paramoteur : un parapente avec un moteur à l’arrière. Il découvre l’aéroclub des Mureaux Paul Louis Weiller, qui dispose d’avions équipés d’un malonnier, ouverts aussi bien aux pilotes valides qu’aux pilotes handicapés moteurs. Grâce à ces avions équipés de commandes « tout manuel », il est possible pour les personnes handicapées des membres inférieurs de retrouver une pleine validité aux commandes d’un avion adapté. Il y passe son brevet de pilote, après un an de fréquentation tous les samedis. Il fonde alors l’association « Les Ailes de l’Aubrac » pour permettre aux enfants en situation de handicap de voler. Chaque année, des pilotes font la tournée des aéroclubs de France et se portent volontaires pour donner les premiers vols à des enfants handicapés.
Un rêve d’amis
C’est à l’aéroport de Toussus-le-Noble, où il avait son avion, que Renaud Chantegrelet s’est lancé un nouveau défi. « Les pilotes d’hélicoptère savaient que j’étais passionné par cet engin. Ils m’ont intégré dans leur groupe Whatsapp, et je me suis alors posé la question : quand est-ce qu’un hélicoptère sera adapté au pilotage par un paraplégique ? A cette époque, personne ne croyait que c’était possible. Mais j’ai eu une réponse de Bernard Rohmer qui m’a dit : « Je le crois, je veux t’aider et on y arrivera. Lire aussi : Meilleurs endroits pour pagayer (SUP). Il a tenu parole et on y est arrivé ! Le projet a mobilisé plus de 12 bénévoles, amis aujourd’hui, qui ont consacré 24 mois de leur temps pour le réaliser, sans oublier mes deux instructeurs Michel Anglade et Stéphane Buy. Nous avions quatre défis à relever. Le premier était de trouver un hélicoptère de type Alouette-2, car nous pensions que le le deuxième était de développer le système de contrôle manuel, le troisième était la certification de l’appareil et le quatrième de passer le brevet de pilote d’hélicoptère. »
Ces défis, relevés les uns après les autres, ressemblent à un grand chelem. Le 18 février 2022, Renaud Chantegrelet est devenu le premier pilote d’hélicoptère paraplégique au monde à piloter le premier avion à commande manuelle au monde. « Dans la vie, quand on croit en ses plans et qu’on se bat, tout est possible. » Il restait à trouver une place à l’héliport de Paris : « J’ai eu la chance d’être totalement épaulée par Rébecca Moreau d’Hélifirst, qui a tout de suite ouvert les bras à moi.
Pendant une heure de vol, il fait bon vivre. Tout simplement magnifique. C’est un cadeau de la vie et je n’ai pas de mots.
Un nouveau rêve
Renaud Chantegrelet souhaite désormais faire le tour de la France en hélicoptère avec « Les Ailes de l’Aubrac » pour faire découvrir aux enfants handicapés cet autre type de vol. Il veut aussi adapter une future machine, aller plus vite, plus loin et enfin aller au bout de ses rêves.