En novembre, La Presse décrivait la hausse du taux d’obésité au Québec, qui touchait 27,6 % de la population en 202011. Sans surprise, les données montrent que l’obésité est en augmentation depuis des décennies. En début d’année, beaucoup s’activent en salle de sport et se mettent au régime dans l’espoir de perdre du poids. Mais au gouvernement, quelle est la résolution 2023 pour lutter contre l’obésité ?
Conseil d’endocrinologie certifié en médecine de l’obésité par l’American Board of Obesity Medicine, Hôpital Charles-LeMoyne
Selon l’article de novembre, le gouvernement s’est engagé à « créer un environnement qui favorise des modes de vie sains et une image corporelle saine ». La réponse est généralement insuffisante pour répondre à l’état de santé le plus courant. La solution? Combattre l’obésité pour ce qu’elle est : une maladie chronique.
En effet, l’obésité est considérée comme une maladie chronique par l’Association médicale canadienne depuis 2015, mais n’est pas traitée comme telle. Prenons par exemple une autre maladie chronique, le diabète (principalement de type 2), dont la prévalence est d’environ 10 %. Au Québec, plus d’une vingtaine de médicaments antidiabétiques sont disponibles sur le marché et tous sont couverts par la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ), et certains nécessitent certains critères de remboursement.
Il n’y a que trois médicaments sur le marché pour l’obésité. Combien sont couverts ? Zéro.
Comment se fait-il que l’obésité, qui est presque trois fois plus fréquente, n’ait pas d’options de traitement dédiées et facilement disponibles ? En tant que médecins, nous demandons que les patients aient une assurance privée pour couvrir un traitement approprié. Alternativement, on peut prescrire un médicament antidiabétique qui fait maigrir, mais celui-ci n’est remboursé qu’aux personnes atteintes de diabète suffisamment sévère. En pratique, nous sommes obligés d’attendre que nos patients obèses soient suffisamment malades pour les traiter adéquatement.
Une autre piste serait de référer le patient pour une chirurgie bariatrique. Cette dernière est couverte si le patient présente une obésité sévère ou une obésité associée à des complications. Cependant, l’accès à la chirurgie et les délais sont extrêmement variables selon les régions. De plus, l’obésité est une maladie complexe qui nécessite une intervention multidisciplinaire : nutritionnistes, kinésiologues, santé mentale, etc., et les services d’un nutritionniste sont presque impossibles à obtenir pour le public. Mais au CLSC c’est gratuit… s’ils sont diabétiques! Il existe également plusieurs cliniques publiques d’obésité au Québec avec des équipes multidisciplinaires, mais encore une fois, les ressources sont limitées et les délais d’attente sont importants.
Comparaison gênante
Lorsqu’on parle de cliniques d’obésité, il est embarrassant de comparer la situation au Québec avec la situation dans d’autres pays occidentaux. Par exemple, la France, où il existe 37 centres spécialisés en obésité répartis sur tout le territoire et désignés par le gouvernement depuis 2012. Lire aussi : Wide 15 minutes pour l’anxiété : les conseils étonnants d’un psychologue pour un meilleur sommeil. Ces cliniques spécialisées sont animées par un groupe national de coordination qui définit le standard de qualité des soins. Un système qui semble bien implanté dans un pays où la prévalence de l’obésité est plus faible qu’ici.
Dans le même temps, la recherche médicale sur l’obésité se développe. De nouveaux médicaments à l’horizon ont des taux d’efficacité impressionnants. Leurs performances sont proches de celles de la chirurgie bariatrique, jamais vues auparavant. Les techniques bariatriques se diversifient et les interventions se font exclusivement par endoscopie aux États-Unis. Cependant, ces innovations passionnantes n’auront aucun impact si elles restent indisponibles pour les patients concernés. Le problème de l’obésité va s’aggraver, ainsi que plus de 200 complications connexes, telles que l’hypertension, les troubles respiratoires et le cancer.
Les résolutions potentielles pour le gouvernement sont donc nombreuses : assurer une couverture médicamenteuse spécifique à l’obésité, rendre plus accessibles les ressources professionnelles, augmenter l’accès à la chirurgie bariatrique, entre autres. Mais le plus important, la pierre angulaire, c’est de reconnaître l’obésité comme une maladie chronique en soi. Ce n’est que lorsque cette situation sera prise au sérieux que nous verrons des changements concrets.
Enfin, pour les personnes qui découvrent la salle de sport et l’alimentation saine : oui, de saines habitudes de vie sont la base pour améliorer son poids. Cela comprend également bien dormir et prendre soin de votre santé mentale. Mais sachez que l’obésité est une maladie complexe qui nécessite souvent un accompagnement professionnel. Alors n’hésitez pas à demander de l’aide. Notre résolution commune en 2023 : demander à nos dirigeants plus de ressources pour traiter l’obésité. Écoutons-nous cette année.