Enquête « Odyssée de la chirurgie esthétique » (5/5). Les injections de botox et autres chirurgies des fesses très lucratives attirent les escrocs, qu’ils aient ou non une formation médicale. Pour le nombre croissant de victimes de « défaillances », les démarches auprès des compagnies d’assurances et des tribunaux aboutissent rarement.
Il aurait été donné au bon Dieu sans reconnaissance. Avec ses grands yeux bleus et son visage de poupée, le Dr. Alla Dubasova a inculqué une confiance aveugle aux femmes qui lui ont confié leurs soins du visage. Avec plein d’acide hyaluronique, de botox ou de fils tenseurs placés sous la peau, le médecin présumé leur promettait des lèvres douces ou des yeux de chat. Alla Dubasova, alias « Beauty_doctor_ella » sur Instagram, a été arrêtée le 14 février à Genève (Suisse), en compagnie de complices. Selon la « plainte aux victimes » lancée trois mois plus tard par le parquet de Genève, les deux femmes « ont exercé des activités médicales illégales » et ont violé la « loi fédérale sur les produits thérapeutiques ».
Le butin du faux médecin se compterait par dizaines en Europe, notamment en Suisse et en France où les injections sont strictement réservées aux médecins. Sur le compte Instagram qu’ils ont créé, « Alladubasovavictims », ils se soutiennent, partageant des histoires de leurs échecs, des photos de lèvres déformées et des captures d’écran d’échanges passionnés avec une Barbie russe en plastique. « Les opérations (sic) ne se passent pas toujours comme vous le souhaitez », s’est-elle défendue, dans un français approximatif, avant son arrestation.
L’usurpatrice ne s’est pas contentée de remodeler son visage, elle a aussi formé d’autres jeunes femmes au métier d' »injectrice » d’acide hyaluronique, c’est-à-dire HA, de cette molécule miraculeuse pour combler les rides ou redessiner l’ovale du visage. Sur Instagram, une certaine Joyce apparaît fièrement à côté d’elle, et dans sa main se trouve un certificat tamponné d’Alla Dubasova confirmant sa capacité à gonfler les lèvres et à corriger les mâchoires. Maintenant, Joyce propose d’imiter avec sa propre « master class ». Elle en a organisé un à Paris le 30 mai, avant de se rendre au Maroc le mois prochain.
Pseudo-experte
Joyce et consorts pullulent sur les réseaux sociaux où ils proposent des injections à des prix jusqu’à trois fois inférieurs à ceux des médecins. Le sujet exaspère l’affable Adel Louafi, chirurgien plasticien à Paris et président du Syndicat national de chirurgie plastique, reconstructive et esthétique (SNCPRE). Dans son bureau cinq étoiles du XVIe arrondissement, il fait défiler des photos sur son ordinateur portable. Cette pièce exiguë où servait le pseudo-expert : une pièce équipée d’un lit d’examen et d’une lampe annulaire, l’accessoire d’éclairage de base des Instagrammeurs, mais sans la boîte jaune pour le retour des seringues usagées. Ceci pourrez vous intéresser : L’AFPC protège le chanvre gratuit avant l’ESEC. Et une photo d’un homme avec une narine gangrenée et un sillon nasogénien suite à une piqûre maladroite. Son « injecteur », qui s’est déchaîné en Seine-Saint-Denis, s’est réfugié dans son Brésil natal pour échapper aux poursuites.
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