Stéphane Troussel : « La Seine-Saint-Denis ne cesse de s’améliorer »

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THOMAS SAMSON / AFP Stéphane Troussel, le président de Seine-Saint-Denis, publie « La Seine-Saint-Denis, la République défiée ».

POLITIQUE – Depuis son élection, en 2012, à la tête d’un des départements les plus pauvres de France, le socialiste Stéphane Troussel se fait discret au niveau national. Ce 20 octobre, il publie Seine-Saint-Denis, la république défiée (Ed. de l’Aube). Un livre qui fait le lien entre son activité locale et les ambitions nationales de la gauche.

Il propose à son camp de produire plus « collectivement », de renforcer le lien entre « parlementaires, élus locaux et société civile » afin « d’offrir un jour une alternative au pays ». Il assume la vidéosurveillance dans son département et traite de « harceleurs » les organisateurs d’extrême droite d’une manifestation pour Lola prévue jeudi. maintenance

L’extrême droite à la tête du pays n’arrive pas qu’aux autres. Cela peut nous arriver. Il n’y a pas de plafond de verre.

Vous écrivez un livre sur la Seine-Saint-Denis, département que vous dirigez depuis 2012. Pourquoi ce besoin d’écrire avec une dimension personnelle ?

Je suis préoccupé par la situation politique. Quand l’extrême droite est qualifiée pour la troisième fois au second tour de l’élection présidentielle, alors qu’elle compte 89 députés et qu’elle est ainsi banalisée, les barrages ont sauté. Il n’y a pas de plafond de verre. L’extrême droite à la tête du pays n’arrive pas qu’aux autres. Cela peut nous arriver.

Je crois que la mission historique de la gauche est de défendre les classes populaires et la jeunesse et ensuite de parler à tout le pays. Je suis à l’image de ces catégories populaires qui ont grandi à une époque où la politique avait sa place. Je sais ce que je dois à l’Éducation nationale et au logement social. J’avais besoin de parler de tout cela pour montrer que les outils de la république sociale se sont affaiblis, ce qui explique aussi une partie de l’abandon des catégories populaires.

Vous êtes un produit d’ascension sociale. N’est-ce pas trop dur de voir que cet ascenseur est souvent bloqué, surtout dans votre département ?

Assurément. Aujourd’hui l’école est inégale, les injustices se multiplient et la promesse d’égalité n’est pas tenue. Inutile de sauter comme une chèvre en disant « république, république », car pour tous ceux qui ne peuvent pas vivre du fruit de leur travail, qui font deux heures de trajet pour se rendre au travail ou à l’école, qui perdent un an parce que leurs professeurs ne sont pas remplacés . , ils ont surtout l’impression que la république n’est qu’un slogan sur les devantures des mairies.

Vous écrivez dans ce livre « La Seine-Saint-Denis s’améliore ». Qu’est-ce qui te fait dire ça?

Elle va mieux car il y a beaucoup de projets sur ce territoire : on va accueillir le plus grand événement sportif avec les JO 2024, on construit des logements et des piscines alors que 70% des enfants qui arrivent en 6ème ne savent pas, non. baignez-vous et nous aurons un tiers des gares du Grand Paris Express (réseau de transport prévu en 2030, ndlr). Quand je gagne un combat, je le dis, ça m’aide à gagner les suivants !

Face à un discours raciste, rance et étriqué, la gauche doit reprendre le combat.

Vous dites souvent que « tout le monde a quelque chose à dire sur la Seine-Saint-Denis ». Il semble que dans ce livre vous vouliez détailler ce que la Seine-Saint-Denis a à dire à la France…

Partout en France, chacun a une image, un cliché, une idée reçue, le plus souvent négative. La perception de l’extérieur affecte la vie des gens, ils en souffrent. Je voulais dire au reste du pays ce que nous sommes : un résumé des défis français. Une population plus jeune, plus populaire, plus diversifiée.

Face au discours raciste, rance et étriqué qui promeut une vision interne de l’identité portée par l’extrême droite et une partie de la droite dure, la gauche doit reprendre le combat. C’est l’histoire de la France d’avoir des citoyens qui viennent de partout, d’ailleurs et qui partagent un socle commun. Nous devons apprécier notre histoire et notre identité multiple.

Emmanuel Macron a déclaré en 2021 que votre département est « la Californie, sans la mer ». Êtes-vous d’accord?

(Rires.) C’est surtout sans égalité. Je préfère les mots positifs à ceux qui stigmatisent ou exploitent nos difficultés. Mais encore une fois, pas de slogan : nous avons moins de services publics que les autres. Rien ne nous est jamais donné. Il faut toujours se mobiliser plus que les autres. Nous savons le faire : c’est notre identité, notre histoire, notre combat.

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A Pantin, une commune de votre département, il a fallu un an au maire pour que l’Etat s’occupe des usagers de crack déplacés de Paris par le ministre de l’intérieur. Pourquoi est-il si difficile d’être entendu lorsque l’on est sélectionné pour le département ?

A Pantin, il y a une chose scandaleuse qui dit comment les pouvoirs publics voient et traitent la Seine-Saint-Denis et ses habitants. Le camp est évacué, mais une occupation de cette nature à l’ouest de l’Île-France n’aurait jamais duré plus d’une semaine. Nous avions besoin de cette mesure de sécurité mais elle ne suffira pas : nous avons besoin d’une réponse saine. Nous sommes la sixième puissance du monde et nous ne pouvons pas gérer 150 toxicomanes ?

JULIEN DE ROSA / AFP Des riverains brandissent un ruban sur lequel on peut lire « Tuez-les ! Protégez-nous ! » alors qu’ils manifestent pour exiger le démantèlement d’un camp pour accros au crack un an après sa mise en place par les autorités à Pantin, au nord de Paris, le 24 septembre 2022. – Sur ordre de la préfecture de police de Paris, les usagers de crack du nord-est de Paris a été déplacé au Square Forceval le 24 septembre 2021, près du quartier des Quatre-Chemins, qui englobe les villes de Pantin et d’Aubervilliers en Seine-Saint-Denis, une banlieue nord de Paris. (Photo de JULIEN DE ROSA / AFP)

Vous êtes favorable à la vidéosurveillance dans les rues de votre département. N’est-ce pas le signe d’une bataille culturelle que la droite est en train de gagner ?

Dans ce thème de la sécurité, le bon point d’entrée est l’inégalité. Ceux qui souffrent le plus de la délinquance, des rodéos et du manque de police sont les habitants de nos territoires. Je n’ai aucun tabou à ce sujet : les gens doivent être protégés. Ce n’est pas une recette miracle, mais c’est un outil technique au service du politique.

Bien sûr, les jets privés devraient être taxés ou interdits. Je vous dis ça alors que Le Bourget est dans mon département et je ne veux pas qu’il disparaisse !

Vous écrivez « celui qui pollue le plus, ce n’est pas l’automobiliste qui roule en Seine-Saint-Denis dans son petit utilitaire diesel, c’est l’homme d’affaires qui passe sa vie dans les avions ». Pourquoi cette formule ?

Dire qu’ici on met en place des politiques environnementales innovantes et que je suis convaincu que la gauche pour y parvenir doit y entrer par la question des inégalités. Ceux qui sont le plus exposés à la pollution sont ceux qui polluent le moins. Cela demandera plus d’efforts à certains qu’à d’autres.

Vous souhaitez interdire ou taxer les jets privés ?

Bien sûr Taxez-les ou interdisez-les. Je suis pour des solutions alternatives. Quand ils transportent une ou deux personnes alors que les avions de ligne sont disponibles, c’est un non-sens. Je vous dis ça car l’aéroport du Bourget est dans mon département et je ne veux pas qu’il soit fermé ! Il doit y avoir une graduation entre la taxe et l’interdiction.

Le ministre de l’Éducation nationale Pap Ndiaye s’inquiète d’une recrudescence des atteintes à la laïcité dans les écoles. Le voyez-vous dans les collèges de Seine-Saint-Denis ?

J’ai parlé avec le directeur de l’académie. La question apparaît plus dans les lycées que dans les collèges (expertise du département, ndlr). Mais je suis très clair : la loi de 2004 (sur les symboles religieux à l’école) est un atout précieux. Elle doit être strictement appliquée. En même temps, je refuse que la laïcité soit instrumentalisée et qu’elle nous empêche de voir qu’il y a des inégalités, des discriminations et du racisme.

Je refuse que la laïcité soit instrumentalisée et qu’elle nous empêche de voir qu’il y a des inégalités, des discriminations et du racisme.

N’y voyez-vous pas une atteinte à la laïcité dans les collèges de Seine-Saint-Denis ?

Dès qu’il y a des faits, il faut être intransigeant, mais je ne veux pas qu’on m’explique qu’il s’agit d’une majorité, parce que ce n’est pas vrai. Lundi j’ai assisté à la minute de silence au collège pour l’hommage à Samuel Paty, suivi d’un débat sur la laïcité qui s’est très bien passé, avec beaucoup de respect. Je n’ignore pas les tentations séparatistes, mais je refuse que ce soit le seul prisme pour parler de nos compatriotes musulmans, qui, pour la majorité, veulent vivre leur foi dans le respect des principes de la République.

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L’affaire Lola prend une tournure nationale. Beaucoup, dont le gouvernement, reconnaissent que l’immigration clandestine n’est pas bien gérée alors que le principal suspect était sous Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF). Qu’est-ce que tu penses?

C’est un drame tellement dégoûtant qu’il est dégoûtant de faire le lien. Je veux entrer dans le débat sur l’immigration, mais pas à l’occasion de cette tragédie. La famille ne veut pas qu’on en parle. Abordons le sujet des OQTF en dehors de ce drame.

La polémique politique monte cependant, car il s’agit d’une personne en situation irrégulière…

Ce crime ne serait-il pas tout aussi odieux s’il était commis par quelqu’un d’autre ? Tous ces gens sont des charognards. Je ne discute pas avec les charognards. Ils organisent une manifestation même sans l’avis de la famille. Je n’ai pas de mots. Je n’ai aucun problème à parler de ces choses, mais pas à faire ce lien.

Mon département va boycotter la coupe du monde qui est indécente. Il n’y aura pas de diffusion dans les gymnases.

Que pensez-vous de la rentrée à gauche ?

J’ai tendance à penser qu’après l’accord NUPES, enfin, la gauche redevient intelligente. Même si l’union est un combat, elle ouvre des perspectives : tout commence.

THOMAS SAMSON / AFP La maire de Paris, députée du Parti socialiste français (Parti socialiste – PS) Anne Hidalgo (C) entourée d’élus PS, chef de file des parlementaires socialistes, Valérie Rabault (L), maire de Bourg-en -Bresse Jean-François Debat, le maire de Rouen Nicolas-Mayer Rossignol (3L), la maire de Châtillon Nadège Azzaz (4L), le maire de Nancy Mathieu Klein (5R), la maire de Rennes Nathalie Appere (4R), la maire de Nantes Johanna Rolland (3rdR) Président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis Stéphane Troussel (2ndR), l’éminent glaciologue français Jean Jouzel pose après son arrivée à Rouen, dans l’ouest de la France, le 12 septembre 2021 pour annoncer qu’elle prévoit se présenter comme candidat du PS à l’élection présidentielle de l’année prochaine. élections – (Photo de Thomas SAMSON / AFP)

Malgré les polémiques sur les allocations, le barbecue ou les affaires Quatennens et Bayou ?

En dehors de ces deux cas. Je crois que la société a besoin d’être rassurée et donc il ne sert à rien d’être dans le buzz, l’insulte ou la vindicte. Je défends le radicalisme durable : arrêtez les petits arrangements que nous avions au PS ; mais aussi de négocier et de faire des compromis. La gauche est forte dans ce département car elle a la tête dans les étoiles et les pieds dans l’argile. Vous devez être ambitieux, mais sérieux. Sinon rien n’est crédible.

Qui soutiendrez-vous à la Convention PS de janvier ?

Je ne veux pas de rappel aux gauchistes irréconciliables. La rencontre de la gauche et des écologistes monte jusqu’aux insoumis. Ceux qui disent que les rebelles sont de gauche se trompent. Je soutiens cette idée et donc Olivier Faure.

Allez-vous boycotter la Coupe du monde du Qatar ?

Oui. C’est indécent. La Seine-Saint-Denis ne dépensera pas d’argent public pour mettre un écran géant dans on ne sait quelle salle, contrairement aux dernières Coupes du monde.

Se présentera-t-il à nouveau en 2028 à la tête du département ?

Le silence. Il est trop tôt pour en parler. Je viens d’être réélu en 2021 donc je ne planifie pas encore. Prendre ma part dans le débat politique national, oui évidemment. Je veux que nous fassions collectivement le lien entre les parlementaires, les élus locaux et la société civile, qui chaque jour invente le monde de demain. Je veux construire des ponts à gauche, avec François Ruffin par exemple et d’autres pour que l’alternance soit à nouveau possible.

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