Ambiance étude dans la salle sociale du Centre Culturel d’Alfortville ce jeudi soir. Le Centre municipal d’action sociale (CCDS) prépare cette nuit depuis trois mois. A 22 heures, dans une trentaine de villes de l’agglomération parisienne, des équipes de bénévoles sillonneront les rues, les espaces verts et les ports pour identifier les sans-abri. En remplissant les questionnaires, les volontaires enrichissent la base de données qui tente chaque année d’affiner la géographie et le profil des personnes vivant dans la rue.
A Alfortville, les statisticiens ont divisé la ville en huit zones. François, 70 ans, retraité de l’armée et chef de l’antenne locale des Petits Frères des Pauvres, est l’un des huit chefs d’équipe qui ont été formés pour encadrer d’autres bénévoles avant l’événement. Il hérite du quartier fleuri, essentiellement pavillonnaire entre les avenues Zola et les avenues Carnot. « Pour être efficace, je vous suggère de nous séparer en deux paires afin que nous zigzaguions dans les rues », suggère-t-il. Trois résidents dans son équipe. Avant de partir, nous échangeons nos numéros de téléphone « au cas où ». « Je ne suis à Alfortville que depuis un an, donc je ne connais pas encore très bien la ville », explique Valérie, conseillère à Pôle emploi. Georges, le directeur administratif municipal, et Sophie, professeur de yoga et de sophrologie, habitent le quartier et le calment.
Ultime entraînement avant le départ
« Ce n’est ni une attaque ni une intervention sociale. Vous devriez proposer un questionnaire à toutes les personnes que vous croisez dans la rue et leur demander s’ils savent où ils aimeraient dormir ce soir. Demander à tout le monde permet d’aller au-delà des notions de sans-abri. Peu importe comment ils sont habillés, à quoi ils ressemblent. Si la personne déclare avoir une solution pour la nuit, ou dormir dans un squat ou chez quelqu’un, ne proposez pas de questionnaire, remerciez la personne et passez à autre chose », résume Laure Le Chevanton, directrice des solidarités à la municipalité, lors de la distillation. Ceci pourrez vous intéresser : Demain nous appartient : Alexandre Brasseur partage une photo controversée d’un des acteurs en coulisses.. quelques astuces pour éviter de harceler les gens, interrompre en cas d’agression, ne pas réveiller les endormis. « On vous invite à être minutieux, ce n’est pas anodin d’aller vérifier si quelqu’un est dans sa voiture, sous la porte cochère. Ne soyez pas déçu si vous ne trouvez pas de sans-abri. Zéro dans le quartier ça va quand même être informatif et une bonne nouvelle ! », renchérit Etienne Fillol, adjoint au maire chargé des solidarités.
Avant de partir, les quatre du Flower Quarter pratiquent leurs interviews. « Je pense qu’on va remplir les cases principales, mais je ne pense pas que les gens passeront beaucoup plus de temps sur nous », lance Georges, qui s’étonne de compter une trentaine de questions. « Je note aussi que cette litanie de questions est un peu longue. Il va falloir s’adapter en fonction de ce qu’on ressent », s’enrichit Valérie après le nouvel exercice de la situation. « Il faut quelqu’un pour poser des questions, pour maintenir un contact visuel avec l’interviewé et quelqu’un pour prendre des notes », suggère François. A 22 heures, gilets jaunes avec le logo Nuit des Solidarités dans le dos et papiers en main, les bénévoles se mettent en route.
Un livreur de repas vide son sac
Chemin faisant, les bénévoles continuent à faire connaissance avant de voir se multiplier les personnes qui attendent le bus 103 pour traverser Alfortville. « Qu’est-ce qu’on fait ? On va les interroger ? », demande l’un d’eux. Trop tard. Le bus marque l’arrêt et ramasse tous les piétons. Voir l’article : « Une ambiance un peu anxieuse » : Ingrid Chauvin revient sur le tournage de l’empoisonnement dans Demain nous appartient (EXCLU). Les premières rues de banlieue nouvellement montées ne donnent rien. « C’est un dortoir, il y a il n’y a plus de chats à cette heure. »
Devant le restaurant africain La Soundiata, le groupe aperçoit un livreur à vélo qui attend une commande. Ce sera la première question. « Au début, il nous a dit qu’il avait un ami qui allait l’aider ce soir, mais plus la conversation avançait, plus il voulait se confier sur son état. Parfois, il dort dans la rue à Alfortville », résume François. L’échange avec cet homme d’une trentaine d’années, sans poste professionnel stable et sans appartement depuis le divorce, a pesé sur les esprits. Comme il était déjà résident du CCAS, il a accepté que l’équipe enregistre son nom et ses coordonnées afin que les services municipaux puissent l’assister.
Avenue Zola, Sophie interroge une jeune femme. « Bonjour, je suis Sophie, bénévole Nuit Solidaire. Avez-vous un endroit où passer la nuit ? » Incompréhension dans les yeux de l’interlocuteur, puis tristesse teintée de colère. « Pourquoi tu me demandes ça? C’est parce que je porte des survêtements ? », s’énerve-t-elle avant de poursuivre. Ce qui causait un petit malaise a vite disparu. « C’est fou de le prendre comme ça ! » Ailleurs, les réactions des interviewés sont plus cocasses. calendriers ! », « Vous êtes des gilets jaunes ? » Avenue Dolet, un passant parle français avec un accent étranger. « Vous cherchez un logement ? Moi ? Ah ! Non, je rentre chez moi. Mais merci, c’est ce que vous faites . »
Après un peu plus d’une heure de traversée du quartier, les quatre volontaires se retrouvent dans un parking peu éclairé où sont garées de nombreuses voitures. Là, un homme se prépare pour la nuit dans son véhicule de fonction. Valérie et Sophie s’approchent de la portière conducteur ouverte. « Il nous a dit qu’il allait dormir. Alors nous l’avons laissé seul, mais nous lui avons laissé une couverture.
De toutes les personnes rencontrées dans le quartier cette nuit-là, seuls le livreur et l’homme du parking étaient sans abri. « C’est trop. Pour être honnête, je ne m’attendais pas à en savoir si peu sur ce quartier. Je ne peux pas imaginer à quoi il ressemble à l’échelle d’une ville ! », déclare Georges.
Retour au quartier général
De retour au centre social du centre culturel, les équipes retournent les questionnaires, qui sont revus par des agents, dont Jérôme Mazet, médecin du centre de santé qui intervient en cas d’urgence médicale signalée par les équipes. Enfin, le formulaire rempli par le livreur de repas ne sera pas pris en compte. Ceci pourrez vous intéresser : Soldes d’hiver : Profitez de 65€ de réduction sur la couette Dodo chez …. « Il t’a dit qu’il avait une solution de logement pour ce soir, tu ne dois pas aller plus loin. Mais ne vous inquiétez pas, nous allons récupérer l’information qu’il veut de l’aide », rassure l’un des agents.
Ce vendredi soir, la Croix-Rouge prendra le relais, comme chaque semaine, cette fois-ci d’une intervention de braquage en bonne et due forme pour les sans-abri signalés dans la ville.
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Quant au recensement de jeudi, les services municipaux doivent encore compiler les résultats. Le bilan du soir sera organisé le mercredi et les résultats pour la ville seront proclamés le 7 février. La restitution globale du recensement sera ensuite organisée à la Mairie de Paris avec la Métropole du Grand Paris et l’Apur.
L’opération, lancée par la ville de Paris elle-même en 2018, a depuis été rejointe par la métropole du Grand Paris et comprend chaque année quelques villes supplémentaires. Elle commence aussi à se répéter dans les régions. Une trentaine de communes d’Ile-de-France* ont participé ce jeudi soir, soit trois fois plus que l’an dernier. En 2022, 2 600 sans-abri étaient recensés à Paris et près de 500 en banlieue.
*Villes participantes : Paris ; pigeons; Courbevoie; Issy-les-Moulineaux ; Nanterre; Neuilly-sur-Seine ; Rueil Malmaison ; Sèvres; ville d’Avray ; Villeneuve la Garenne ; Aubervilliers; Bagnolet; Bobigny; Bondi ; Drancy; Gagni; Lilas; Noisy-le-Sec ; Pierrefitte-sur-Seine ; Romainville; Rosny-sous-Bois ; Saint-Denis ; Saint-Ouen-sur-Seine ; Le Pré Saint Gervais; Alfortville; Charenton-le-Pont; Bicetra Kremlin; Villejuif; Vincennes.