Au lendemain de la remise de la « mission rapide » aux urgences confiée il y a un mois au Dr François Braun, qui proposait 41 mesures, Elisabeth Borne, qui s’est rendue au centre hospitalier de Pontoise (Val-d’Oise), a affirmé qu' »il tient toutes les propositions « pour débloquer les hôpitaux cet été. Ces services, qui sont en première ligne avec la pandémie de Covid depuis plus de deux ans, sont en crise aiguë. Le Samu-Urgences de France recensait ainsi fin mai au moins 120 services contraints de limiter leurs activités faute de soignants, partout en France, y compris de grands CHU comme Bordeaux, Toulouse ou Grenoble, c’est pourquoi le Dr Braun est devenu le président de cette instance, qui sera mandatée par Emmanuel Macron.
Avant même ses conclusions, le pouvoir exécutif avait déjà adopté début juin les premières mesures, notamment le doublement des heures supplémentaires à l’hôpital et l’agrément de « l’exercice immédiat » pour les élèves infirmiers et aides-soignants hors établissement. Le chef du gouvernement a donc complété le décret par d’autres « réponses à court terme », à commencer par « l’indemnisation complémentaire » du travail de nuit, en passant par « le doublement de la majoration pour le personnel médical » jusqu’à une majoration de 50% pour les médecins de garde.
Une façon de « reconnaître les conditions pénibles du travail de nuit », mais qui sera d’abord « expérimentée pendant trois mois » avant une éventuelle viabilité. Les médecins libéraux auront également droit à « une majoration de 15 € pour une consultation s’ils voient quelqu’un qui ne fait pas partie de leur patientèle », pour « les inciter à voir des personnes pour des soins non programmés », a ajouté Mme Borne.
Diminuer la pression
Outre cette aide financière, tous les moyens sont bons pour « mobiliser tous les professionnels de santé » et pallier les urgences : « procédures facilitées » pour les médecins retraités reprenant du service, centres de soins autorisés à rester « ouverts le samedi matin », nouvelles lois annoncées pour pharmaciens, kinésithérapeutes et autres soignants, « par exemple renouveler une ordonnance pour des soins chroniques ». A voir aussi : A proximité de Rennes. Les urgences de Saint-Grégoire ferment la nuit pendant trois semaines.
Mais augmenter l’offre ne suffit pas, la demande doit également diminuer. Quitte à désigner le Sama comme le premier refuge : « Ce que nous voulons, c’est que tout le monde puisse prendre le réflexe le 15 et ne pas systématiquement venir aux urgences », a déclaré le premier ministre, jugeant « il est impossible que l’hôpital peut répondre à tous les besoins de soins des Français. » Un point important pour le Dr Braun, qui a estimé que « ce message permettra de réduire la pression sur les services d’urgence dès la semaine prochaine dans les zones à problèmes ».
Anticipant toutefois « une augmentation très probable des appels », il a jugé nécessaire « d’augmenter le nombre d’assistants médicaux réglementaires » pour y répondre. Sans insister sur le filtrage général d’urgence par Sam, principale proposition de son rapport que le Premier ministre s’est bien gardé de mentionner explicitement. Critiquée par certains médecins urgentistes, dont l’emblématique Dr Patrick Pelloux qui avait auparavant dénoncé « l’interruption du service public » qui pourrait entraîner des « morts évitables », la mesure restera donc entre les mains de chaque hôpital.
Le gouvernement n’a pas non plus évoqué d’obligation ou de restriction accrue des soins pour les médecins libéraux, dont l’évocation le mois dernier par le président de la Fédération hospitalière de France (FHF), Frédéric Valletoux, a immédiatement provoqué un tollé de la profession. Dans un communiqué, cette dernière s’est dite partiellement satisfaite du Premier ministre, estimant qu’elle « pourrait apporter les réponses nécessaires ». Cependant, selon lui, « ce sont des mesures de très court terme qui devront être complétées par des mesures ambitieuses dès la rentrée ».
« Ces recommandations sont inquiétantes », a déclaré le Dr Christophe Prudhomme, médecin urgentiste au Sam 93, porte-parole de l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF) et représentant national de la CGT Santé. « Il faut revoir le système. En Allemagne et en Autriche, tous les médecins participent à ce qu’on appelle la continuité des soins. Ils sont de garde. Si on demandait à tous les médecins de faire un effort – qu’ils soient généralistes, spécialistes de ville, qu’ils ils travaillent dans une clinique externe, dans un hôpital – pour travailler de nuit, les week-ends et les jours fériés, nous aurions pu trouver une solution. c’est : il n’y a pas de médecins, nous fermons. Nous ne réglementons toujours pas la nomination des médecins, nous continuons payez-les à l’acte, nous avons encore des hôpitaux où il y a des services médicaux. Des spécialités qui ne conviennent plus aux patients. Les mesures proposées par le rapport Braun sont imparfaites. Je ne suis pas sûr, en tout cas, que ces mesures suffisent à stopper le flux des missions, qui met ces services à rude épreuve.