En cette fête de fin d’année, les hôpitaux d’Ile-de-France sont débordés par la triple épidémie de Covid-19, bronchiolite et grippe. L’ARS d’Ile de France appelle les professionnels de santé à se mobiliser exceptionnellement.
Le service des urgences de l’hôpital Avicennes de Bobigny affiche complet. Selon son responsable, Frédéric Adnet, le service reçoit en moyenne 150 patients par jour, contre 110 habituellement. Un phénomène qui touche de nombreux établissements de santé à travers la France.
« Le système embolise d’abord parce que nous ne trouvons pas d’endroit où orienter nos patients vers d’autres services. A Avicennes, 30% des lits sont fermés faute de personnel. »
Frédéric Adnet, chef du service des urgences du CHU Avicennes de Bobigny
Le mal est connu de tous. Depuis l’épidémie de Covid, les hôpitaux ont dû faire face à des départs massifs de soignants et à des fermetures de lits. Et à chaque choc de santé, c’est une rechute. En fin d’année, la France était frappée par une triple épidémie de Covid, de bronchiolite et de grippe. Selon Santé Publique France, 19 242 visites aux urgences pour des symptômes pseudo-grippaux ont été enregistrées à travers le pays la semaine dernière. Et tout le système hospitalier est en convulsions.
A cela s’ajoute la grève de la mi-Noël et du Nouvel An des médecins généralistes, initiée par le collectif « Médecins de demain ». Soutenu par plusieurs syndicats (UFML, FMF, SML, Jeunes Médecins), il demande notamment une revalorisation du prix de la consultation de 25 € à 50 € pour rendre la profession attractive, notamment auprès des jeunes. L’appel à la grève a été « fermement » condamné par le ministre de la Santé François Braun dans un communiqué transmis à la presse lundi.
« Alors que notre système de santé fait face à une situation exceptionnelle, compte tenu notamment de la triple épidémie qui perdure à travers la France, cela exerce une pression accrue sur les hôpitaux et les services d’urgence qui sont déjà dans une situation critique. »
François Braun, ministre de la Santé
Alors comment prendre soin de soi lors de cette fête de fin d’année ? Beaucoup approchent les 15. Sur le Samu de Seine-Saint-Denis, le nombre d’appels augmente. « Nous ne travaillons pas dans des conditions sûres », reconnaît Christophe Prudhomme, médecin urgentiste au Samu de Seine-Saint-Denis et délégué national CGT à la santé. Le temps de décrochage peut être plus long. Il s’agit d’un risque pour le patient dû au colmatage de l’étalon. C’est le cas depuis cet été, où l’on enregistre 20 à 30% d’appels en plus. Le problème est le manque de médecin généraliste. Et pour ce Noël, c’est aggravé par la grève… ». Mardi midi, un médecin urgentiste a posté sur les réseaux sociaux une photo de la table de réanimation en Ile de France.
Selon l’Agence régionale de santé, il y a actuellement 2 684 patients dans les services de réanimation, les unités de soins intensifs et les unités de surveillance continue. « Les lits restent disponibles, en nombre limité, et la capacité change quotidiennement », précise l’ARS.
Face à cette situation, sa directrice Amélie Verdier a demandé une mobilisation exceptionnelle vendredi 23 décembre. « Je lance un appel solennel aux libéraux, au secteur privé, à mobiliser tout le monde pour soulager les hôpitaux en cette période de grande tension dans l’offre de soins. » Les prestataires de soins qui « souhaitent que les soignants puissent prendre un congé bien mérité » ont été « encouragés à reprogrammer tout ce qu’ils pouvaient ». Plus de 1.500 étudiants en médecine se sont portés volontaires pour des séances dans les hôpitaux de la région, selon l’ARS.
Suffisant ? « Le personnel infirmier et médical est débordé. Je le vois tous les jours, tranche le chef du service d’ambulance des Avicennes de Bobigny, Frédéric Adnet. Je redoute une nouvelle vague de voyages dans les semaines et les mois à venir. »
« Cette situation d’urgence est prévisible. Les explications du gouvernement doivent être rejetées. De fortes épidémies de grippe surviennent tous les 5 à 10 ans. La chose unique est que l’hôpital ne peut pas le gérer! »
Christophe Prudhomme, médecin urgentiste au Samu 93
Tous pointent du doigt les chiffres inquiétants compilés par le Samu-Urgences de France : au moins 23 décès à travers le pays auraient pu être évités si les patients avaient pu être pris en charge rapidement aux urgences. Des rapports ont été recueillis par le syndicat auprès des responsables des urgences dans 13 quartiers. Certains pensent que ce nombre est largement sous-estimé. Peut-être environ 150.