Yannick Giguère évite d’être reconnu coupable de viol en plaidant…

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Un homme accusé d’avoir agressé sexuellement une petite amie a invoqué avec succès une défense inhabituelle de somnambulisme sexuel. Mais Yannick Giguère n’a pas été acquitté : mardi, le juge a plutôt rendu un verdict le déclarant non responsable pénalement pour cause de troubles mentaux. Il va maintenant comparaître devant la Commission de révision des troubles mentaux, qui décidera de son sort.

Lors du procès, l’accusé de 46 ans n’a pas nié les faits reprochés, mais a affirmé ne se souvenir de rien.

Et puis, expertise psychiatrique et neurologique à l’appui, il déclare souffrir de sexsomnie, une forme de somnambulisme se manifestant par des épisodes au cours desquels il accomplit involontairement des actes sexuels dans son sommeil, sans comprendre ce qui se passe. Il a donc demandé à être acquitté.

Un soir de juillet 2018, la victime s’était endormie chez l’accusé avec un ami après une soirée bien arrosée. Elle a témoigné qu’il lui avait proposé de dormir dans le salon ou dans son lit; elle a choisi la dernière option. Mais elle s’est réveillée au milieu de la nuit, Yannick Giguère sur elle, qui se frottait l’aine. Elle dit qu’elle s’est figée, qu’elle a eu peur de sa réaction et qu’elle a fermé les yeux. Puis l’homme la pénétra machinalement, sans paroles ni caresses. Elle a porté plainte le lendemain matin.

Le procureur de la Couronne Me Bruno Ménard avait demandé une condamnation. Yannick Giguère n’est pas crédible et était en état d’ébriété cette nuit-là, ce qui n’est pas une excuse dans les cas d’agression sexuelle, a-t-il plaidé.

En lisant son jugement dans une salle d’audience de Montréal pendant une heure et demie, le juge André Perreault, de la Cour du Québec, a d’abord tranché ceci : il est clair pour lui que la plaignante a été victime d’une agression sexuelle. Il a également rappelé que les tribunaux ont par le passé accepté des défenses de sexsomnie, une forme d’automatisme.

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Ainsi, pour éviter une condamnation, Yannick Giguère a dû convaincre le juge du caractère « involontaire » de ses actes. Le magistrat réfléchit longuement à la question.

Sur la base de rapports d’experts qu’il a jugés crédibles, ainsi que de témoignages – notamment celui d’une ex-femme de Yannick Giguère qui a raconté au procès avoir commis des actes sexuels dans son sommeil à plusieurs reprises lorsqu’ils étaient en couple. – le juge a fait cette découverte : « La preuve établit clairement qu’à l’époque (juillet 2018) il souffrait de sexsomnie. »

Or, il s’agit d’un trouble mental, souligne le magistrat. Il a donc déclaré l’homme non responsable pénalement en raison d’un trouble mental : un verdict qui n’est ni un acquittement ni une condamnation.

Le juge Perreault a toutefois dit qu’il avait des préoccupations « d’ordre public » parce que l’accusé présentait un risque pour le public. Il a eu plusieurs épisodes de sexsomnie dans le passé, et clairement « ses efforts ne suffisent pas » pour l’empêcher. Ainsi, son cas sera examiné par la Commission de révision des troubles mentaux, qui aura plusieurs options : le garder dans un établissement psychiatrique, le libérer ou encore le libérer avec des conditions, par exemple, l’obligeant à prendre des médicaments.

De plus, compte tenu de la nature des actes commis, le magistrat a ordonné l’inscription de M. Giguère au registre des délinquants sexuels pour 20 ans.

Dans la salle d’audience, la plaignante, Andréanne Slythe, a écouté le juge lire son jugement sans broncher. La femme peut maintenant être identifiée, car elle a demandé au juge de lever l’interdiction de publication de son nom.

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Devant les journalistes, dans un couloir du palais, il s’est déclaré satisfait du résultat. « On ne s’en tire pas avec une tape sur les doigts. Il y a des conséquences à cela. Je pense que justice a été rendue. Et je suis heureux de tourner la page. »

Elle craint que cette défense contre la sexsomnie ne soit utilisée en permanence par les agresseurs. Anticipant cela, le juge a prévenu dans sa décision très circonstanciée : « Le tribunal tient à souligner qu’il ne serait pas conseillé à un agresseur potentiel de commettre une agression sexuelle en espérant, sur la base de la présente affaire, qu’il pourrait ne pas être reconnu coupable de inventer une sexsomnie. D’autres ont déjà essayé, sans succès, dit-il : « Ils étaient condamnés. »

M. Ménard est d’accord : c’est une défense rare et complexe, avec de nombreuses conditions à remplir. « Ce n’est pas une formule magique pour un accusé. »